Le nombre de policiers à Alger et leur détermination à user la violence le vendredi 21 mai ont dissuadé les Algérois à marcher comme ils l'ont fait 117 fois depuis 2019. A y bien réfléchir, heureusement que les marcheurs ont renoncé à marcher, car autrement, il y aurait eu un carnage.
Se défendant contre la violence des policiers, les marcheurs auraient riposté en les frappant. L'Etat-Major aurait trouvé l'occasion qu'il attend pour décréter l'état de siège et déployer les unités de l'armée. Ce serait le saut vers l'inconnu.
Le Hirak a déjoué le piège et a tenu au caractère pacifique de la contestation. Le régime veut montrer que la population a cessé de manifester et qu'elle ne le conteste plus. Or les photos d'Alger quadrillée par les centaines de camions de police indiquent que le régime repose sur la violence policière et non sur le consentement de la population.
Les manifestations du Hirak cherchent à montrer que le régime n'a pas de légitimité politique. En quadrillant Alger par des milliers de policiers prêts à frapper et à emprisonner, les dirigeants reconnaissent leur déficit de légitimité politique qu'ils essayent de compenser par la violence policière.
Qu'il manifeste ou qu'il est empêché de manifester, le Hirak arrive à son but: montrer à l'opinion nationale et internationale que le régime n'a pas de légitimité et qu'il ne repose que sur la violence d'Etat. Les images d'Alger, rappelant une capitale d'un pays d'Amérique Latine sous la dictature militaro-policière, discréditent encore plus le régime. Car en permettant les marches du vendredi, le régime indiquait qu'il respectait un droit garanti par la constitution. En interdisant les marches, les dirigeants montrent qu'ils n'ont aucune volonté de faire respecter la constitution.
En tant que conscience collective demandant la restauration de l'Etat et l'institutionnalisation de l'autorité publique, le Hirak exprime une demande profonde de la société. Il ne s'éteindra pas face à quelques centaines de camions de policiers. Le Hirak inventera de nouvelles de protestation tout en tenant au caractère pacifique du mouvement.