Décidément, Hollywood verse beaucoup dans le film d’enquête ces temps-ci et sur les années Post 11 Septembre. C’est le cas ici où nous replongeons dans la campagne présidentielle de 2004.
Nous suivons ici une certaine Mary Mapes, journaliste et productrice de la fameuse émission 60 Minutes, présentée par Dan Rather, le journaliste star de CBS. Après avoir dévoilé l’affaire d’Abu Gharib, son équipe s’emploie à prouver que le président-candidat George W. Bush a menti sur ses états de service dans l’armée, alors même que son concurrent John Kerry subit des attaques du même type.
Le film de James Vanderbilt est une adaptation du livre de cette même journaliste. Nous sommes ici bien loin des piètres Amazing Spiderman du réalisateur, pour un discours beaucoup plus engagé. Il est vrai qu’Hollywood est plus démocrate que républicain en général, dit-on. Mais en choisissant l’adaptation du livre, on sait d’ores et déjà que le film défendra la position de la journaliste virée de CBS pour s’être attaquée au président Bush.
Le réalisateur s’attache à montrer la mécanique de l’enquête, les rouages de CBS avec une pléiade d’acteurs pour le servir : L’omniprésente Cate Blanchett en héroïne, Robert Redford en Dan Rather, mais aussi Dennis Quaid ou Topher Grace.
Quand on dit film militant, c’est ainsi qu’il a été reçu, ses détracteurs lui reprochant une vision partiale de l’affaire. Pourtant, Vanderbilt va un peu plus loin que l’affaire. Il s’emploie finalement plus à montrer la mort du journalisme, la fin du média d’information et la naissance de l’info-tainment, au service de groupes financiers cherchant à peser sur la politique.
Dan Rather a visiblement apprécié cette vision et ce qu’on lui fait dire de l’histoire. Même s’il n’est pas le personnage central, il représente Le Journalisme, celui qui disparaît avec son départ. Les rachats des derniers journaux indépendants et l’affiliation de certaines chaines à des partis ne font que donner raison à cette vision. Vanderbilt en rajoute sans doute un peu trop avec le discours de Mike Smith qui tente d’imiter les moments de grâce d’un « Mr Smith au sénat », par exemple. Mais peut-on lui reprocher sur un sujet aussi brûlant, quand l’information passe parfois plus par les réseaux sociaux et le people que par le détail et le fond des affaires qui agitent ce monde?
Rétrospectivement, je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec l’affaire Cahuzac. De la même manière, un tir de barrage de la presse contre Mediapart constitua à s’attaquer aux preuves plus que sur les évidentes fautes du ministre.
Le film montre bien toute cette machine politico-médiatique qui s’emploie à détruire la brebis galeuse par des calomnies. Malheureusement pour Mary Mapes, George W. Bush n’avoua jamais avoir déserté. Accessoirement, cela montre aussi la place de l’armée et du patriotisme dans la société américaine. En France, personne ne va fouiller dans les états de service des candidats à la présidentielle, si ce n’est les tortures en Algérie de Jean-Marie Le Pen.
Sans être un chef d’œuvre, Truth est un bon film qui invite le spectateur à s’interroger un peu plus sur ce qu’il voit dans les médias, sur sa soif de fausses informations et distractions plutôt que de la compréhension des faits.