La lumière sur l'affaire Petrofac

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Au risque de choquer quelques envolées verbales sur mon fil d'actualité, l'affaire Petrofac me laisse un peu perplexe:


-Petrofac, entreprise d'exploitation pétrolière et gazière s'implante en Tunisie en 2006, à la suite d'un contrat de concession d'exploitation gazier à Chergui, une des 2 iles que compte l'archipel des iles Kerkennah... Son implantation vient à la suite d'une 1ere concession d'exploitation pétrolière concédée à une entreprise britannique TPS.

- L'archipel de Kerkennah a un climat aride et n'est donc pas propice à l'agriculture... La seule ressource de l'île est la pêche. Lorsque TPS s'implante à Kerkennah, il n' y a pas eu moins de 4 marées noires qui ont détruit une bonne partie de la biodiversité de l'archipel! Ces catastrophes environnementales ont occasionné des pertes considérables pour l'économie de l'archipel et une augmentation fulgurante du chômage et de la pauvreté.

- Dans ce contexte, le contrat de concession d'exploitation gazier attribué à Petrofac, avec toutes les exonérations fiscales, sociales, aides de l'état etc... prévoit un versement annuel de 1,5 M de dinars à un fond pour l'emploi de la région ainsi, que le versement d'aides (pour la protection du littoral, protection de la biodiversité, etc....) - En 2011, juste après la révolution, alors que Petrofac s'était engagé à participer activement au développement et surtout à la création d'emploi dans l'archipel Petrofac prend une décision unilatérale de cesser tous les versements...

- En avril 2016, un collectif, "Union des Diplômés chômeurs" décide d'organiser un sit-in devant Petrofac exigeant la reprise immédiate du financement promis au fond pour l'emploi ainsi que le recouvrements des 5 dernières années, soit un Total de 10 millions de dinars... En réponse, une violente répression policière a mis fin au sit-in…

Je ne parlerais pas des soupçons de corruptions relatés par les tabloïds anglais sur les contrats de concessions concédés à Petrofac pour l'exploitation de gisements gaziers et pétroliers en Afrique, je ne parlerais pas non plus des soupçons de corruption, toujours en cours d'instruction, dans l'obtention de la concession d'exploitation du gisement de Chergui signé en 2006 avec l'appui d'un certains nombres de personnes proche du régime.

Quoiqu'il en soit, je suis pour l'investissement étranger en Tunisie, je pense qu'il est indispensable au développement de mon pays, je souhaite que mon pays jouisse d'une image de partenaire fiable, transparent, loyal et qui respecte ses engagements... Mais je refuse que nous nous prostituions devant des "colons économiques" sous prétexte que leurs investissements sont indispensables à notre pays.

Je ne sais pas si ces jeunes sont des "bandiyas", je ne sais pas si leurs revendications sont louables ou pas, mais ce que je sais c'est que le comportement de Petrofac, après avoir engorgé des aides à son implantation et des bénéfices colossaux, en refusant de s'assoir à la table des négociations, en refusant de payer son dû à la "communauté", en menaçant de plier bagage, se comporte de manière honteusement déloyale... Qu'ils partent!

NB: Au lieu de blâmer ces jeunes sans ressources, sans espoir, j'encourage vivement les journalistes à faire une enquête approfondie sur les agissements de Petrofac en Tunisie.

MISE A JOUR: Concernant l'affaire Petrofac, suite à des recherches, échanges, etc… Une mise à jour s’impose:


- En 2011, Il semblerait qu Petrofac s'était engagée à indemniser le fond pour l'emploi à hauteur de 1,5 MDt/an, et ce jusqu'en 2014! Pour information, ce fond verse une indemnité à 266 chômeurs (40 non diplômés : 350 Dt/mois, et 226 Diplômés : 450 Dt/mois). Fin 2014, l'état demande à Petrofac de continuer à alimenter le fond, le temps que l'état trouve une solution de reconversion… Petrofac accepte et continue à financer le fond.

- Suite à cela, En 2015, d'une part:

- Constatant que plusieurs de ces chômeurs étaient employés comme agent administratif dans les administrations ayant pour seule rémunération les indemnités du fon Petrofac dit avoir honoré ses engagements prévus jusqu'en 2014, et que c'était à l'état maintenant de proposer une solution à ces chômeurs. L'état émet une fin de non-recevoir, ne gère pas la situation … Petrofac arrête de financer le fond.

- Parallèlement, les chômeurs bénéficiant de ces indemnités, ne sachant pas jusqu’à quand elles seraient maintenues les mettant ainsi dans une grande précarité, demandent à être intégrer dans l'effectif de Petrofac (salaires + Protection sociale).

- En décembre 2015, la gronde sociale prend de l'ampleur, et les marins-pêcheurs (qui représentent la majeure partie des habitants de l’archipel) voyant les revendications s'amplifier, se greffent à la mobilisation, et annoncent qu'aucun accord ne se fera s'ils ne sont pas inclus. Ils demandent de cesser d'alimenter un fond uniquement destiné à l'emploi, mais de le transformer en un fond pour le développement "en contrepartie du coût environnemental de la pollution du littoral" ….Sit-in sauvage, blocage de la production, la police est dépêchée sur les lieux, violents affrontements, saccage des biens publics… L’état porte plainte contre les sitinneurs !

- Dès lors, l’affaire se politise et le 16 Avril Essid déclare que des membres du parti hezb ettahrir et du front populaire ont rejoint les sitinneurs et seraient derrière ces troubles…Parallèlement, Petrofac dénonce d’un côté la passivité des autorités qui n’arrivent pas à réagir pour mettre un terme au sit-in sauvage, et de l’autre, à genoux avec une production à l’arrêt, Petrofac est dans l’incapacité d’honorer ses engagements vis-à-vis de ses clients. Ils menacent de plier bagage si une solution n’est pas rapidement trouver !

- L'état intervient et un accord est trouvé avec les revendicateurs: Arrêt des poursuites judiciaires contre les sitinneurs, recrutement du groupe des 266 en 3 étapes (30% en 2017, 30% en 2018, et 40% en 2019), et l’accès aux marins-pêcheurs au fond, préalablement réservé à l’emploi transformé en un fond pour le développement, qui servira à financer la restructuration des infrastructures de pêche (Ports, dépôts de stockage intermédiaires, etc.….).

- Petrofacc accepte l’accord, sous condition que le coût de recrutement du groupe des 266 vienne en déduction du montant qui seront versés au fond pour le développement. Le montant que propose alors Petrofac au fond pour le développement est fixé à 2,7 Mds Dt.

- Les marins-pêcheurs rétorquent en refusant le montant proposé pa Petrofac auquel il faudra retrancher les couts liés au recrutement du groupe des 266, justifiant leur refus par le fait qu’il ne restera plus rien pour le développement de la région, notamment pour financer leurs revendications ! Ils demandent la somme de 10 Mdt…. La situation est bloquée… !

Le conflit qui était social, devient régional, politique, puis, dernièrement National !

La situation est telle aujourd’hui qu’il n’y a ni coupables, ni victimes. Les chômeurs rejoins par les marins-pêcheurs et infiltrés par des mouvements politiques n’ont pas su préserver la légitimité de leur revendications, Petrofac n’a pas su anticiper l’ampleur que pouvait prendre cette mobilisation et ainsi proposer les solutions adéquates, l’état qui a totalement failli à ses responsabilités n’a pas eu le courage d’appliquer la loi.

N.B : Je continue à encourager vivement les journalistes à se pencher sur ce dossier pour mettre la lumière sur les réelles intentions de toutes les parties prenantes. C’est un impératif pour corriger là ou nous avons failli.

BREAKING NEWS: Il semblerait qu'un accord ait été signé entre l'état et Petrofac. Petrofac ne quittera donc pas la Tunisie et continuera à exploiter le gisement gazier de Chergui.

Il n'en demeure pas moins que toute la lumière devra être faite sur ce qu'il s'est réellement passé.

Avoir un nouveau code d'investissement, un nouveau chef de gouvernement, un nouveau prêt des bailleurs de fond internationaux, etc… Ne serviront à rien, si nous ne faisons pas en sorte d'instaurer une fiabilité et une transparence dans les mécanismes et les leviers d'investissements nécessaires au développement de notre pays.

L'état doit avoir l'obligation de rendre publique toutes les tractations, discussions, ententes et contrats de concessions signés avec des partenaires locaux ou étrangers…Il en va de la crédibilité de notre économie !

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