M. Ben Ali… Nous sommes le 7 novembre.

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Je ne sais dans quel état d'esprit vous êtes , ni quel paysage vous avez sous les yeux , ni à qui vous parlerez au cours de la journée , ni ce que vous direz à votre fils aujourd'hui , ni quelles images se profileront dans votre mémoire , je ne sais si vous continuez à vous teindre les cheveux en noir corbeau , ni si vous arborez toujours ce sourire à la fois mielleux et carnassier , ni si vous dormez la nuit sans camisole chimique , ni si vous faites des rêves ou des cauchemars..Ni si vous conservez encore intact votre mauvais goût, votre penchant irrépressible pour le clinquant, le tape-à-l’œil, le en veux-tu en voila.....

En revanche, j'aimerais savoir si vous êtes conscient de la densité de la mélasse que vous avez laissé derrière vous...si ces années de sand and sun vous ont donné suffisamment de lucidité pour mesurer l'ampleur de la débâcle politique , culturel , et humaine dans laquelle vous nous avez largués..

J'aimerais savoir comment vous faites pour alimenter encore les fantasmes des cloches que vous nous avez laissé en héritage...Quel bouillon d'onze heures vous leur avez fait ingurgiter pour qu'ils continuent à chialer, à vagir ainsi…

J'aimerais savoir si au fond de votre palais des sables et du vent il vous arrive, furtivement, d'avoir des inquiétudes, des regrets, des remords…

Je ne nourris ni haine ni acrimonie à votre égard, mais simplement de la tristesse, cette tristesse que Prévert rend si bien,


"Il pleut sans cesse sur Brest

Comme il pleuvait avant

Mais ce n'est plus pareil et tout est abîmé

C'est une pluie de deuil terrible et désolée

Ce n'est même plus l'orage

De fer d'acier de sang

Tout simplement des nuages

Qui crèvent comme des chiens

Des chiens qui disparaissent

Au fil de l'eau sur Brest

Et vont pourrir au loin

Au loin très loin de Brest "

Méfiez-vous du sable M. Ben Ali, ses tempêtes ensevelissent tout...même les noms.

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