France/Tunisie : Une binationalité « à la carte » ? - (Partie 2)

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La politique d’allégeance de l’État‎ tunisien à l’égard des binationaux : un nouveau paradigme ?

Dans une analyse comparative des politiques d’allégeance conduites par les État‎s à l’égard de leurs « communautés expatriées », Stéphane Dufoix observe que « de manière générale, les situations de transition démocratique favorisent également la prise en compte des émigrés. Le passage de la dictature à la démocratie crée une situation dans laquelle la restauration d’une unité nationale par le rétablissement de procédures pluralistes de désignation des représentants rencontre les préoccupations des émigrés (c’est le cas du Mexique ou de la Grèce notamment), voire des exilés quand le régime antérieur avait vu s’organiser une opposition politique depuis l’étranger, comme dans le cas du Chili »32. Cette observation est-elle corroborée dans le cas tunisien qui connait depuis la Révolution du 14 janvier un retour en force de la « question des binationaux » sur la scène publique ?

Il est vrai que les mouvements protestataires en Tunisie et dans le monde arabe, en général, ont très largement révélé les failles et les limites des politiques traditionnelles d’allégeance nationale pratiquées depuis plus de cinquante ans par les État‎s à l’égard de leurs diasporas et de leurs migrants. Car, jusqu’à une période récente, les recherches en sciences sociales se sont surtout attachées à rendre compte des registres autoritaire et « nationaliste exclusif » de ces politiques, les État‎s d’origine considérant leurs migrants et leurs enfants comme le prolongement naturel de la communauté nationale et donc comme des « sujets expatriés » soumis totalement à la « raison d’État‎ » et aux intérêts supérieurs de la mère-patrie. Pour cette raison, la majorité d’entre eux refusaient catégoriquement la binationalité et l’inscription de leur diaspora dans les enjeux citoyens et politiques des sociétés d’accueil.

Pour les autorités politiques du pays d’origine, l’intégration et l’assimilation étaient synonymes de « trahison nationale » (connotation patriotique), voire d’apostasie33 (connotation religieuse). Les politiques d’allégeance faisaient appel à des registres multiples, dont la religion (l’islam) et la langue (les ELCO34), qui étaient des moyens pour les État‎s de maintenir un contrôle social sur les migrants à travers les réseaux consulaires et diplomatiques. Or, les processus d’ouverture politique et culturelle amorcés par les État‎s d’origine (politiques d’infitah), depuis la fin des années 1980, les ont progressivement contraints à accepter le principe de binationalité et une relative « démocratisation » dans leur gestion à distance des communautés migrantes et diasporiques.

D’une certaine manière, l’on peut dire qu’ils n’avaient pas vraiment le choix, au risque de perdre toute influence sur leurs émigrés et expatriés de plus en plus rétifs à « l’autoritarisme de là-bas ». En ce sens, les politiques officielles d’allégeance ont dû intégrer une certaine dose de « pluralisme », même si les velléités autoritaires des État‎s ont perduré (le cas de la Tunisie est ici exemplaire), notamment en ce qui concerne la surveillance politique et policière de leurs communautés expatriées. Toutefois, l’évolution la plus marquante provient des descendants de migrants eux-mêmes (les binationaux nés et socialisés dans les sociétés d’accueil) qui ont développé des attitudes et des comportements de distanciation à l’égard des État‎s d’origine. En effet, les nouvelles générations issues de l’immigration ont contesté progressivement les modes d’allégeance autoritaires, privilégiant des formes d’allégeance librement consenties et négociées.

Les printemps arabes ont sans doute contribué à accélérer ce processus d’émancipation des binationaux à l’égard des modes autoritaires de gestion des allégeances nationales. Pour autant, ces changements ne se sont pas accomplis du jour au lendemain. Ils procèdent d’une évolution sur le temps long qui est loin d’être linéaire et irréversible, dans la mesure où la « tentation autoritaire » reste très prégnante dans les État‎s d’origine. D’où la nécessité de faire un bref retour sur l’histoire de ces politiques d’allégeance.

1. Le poids de l’Histoire : une gestion autoritaire et paternaliste des allégeances nationales

Aux lendemains de son indépendance (1956), la Tunisie à l’instar de la plupart des État‎s de la région a déployé à l’égard de ses émigrés et de ses expatriés une politique de perpétuation des allégeances nationales qui fonctionnait sur un registre exclusiviste et unanimiste35. Il s’agissait de travailler les esprits migrants, afin qu’ils restent entièrement dévoués et fidèles à la mère-patrie et au régime bourguibien. Pour ces raisons, la politique officielle d’allégeance a souvent emprunté des modes autoritaire et paternaliste.

Ainsi, les instances étatiques et paraétatiques avaient pour mission de contrôler et de surveiller les émigrés tunisiens en Europe, diffusant un « nationalisme officiel » qui n’autorisait aucune critique et dissidence. De manière pragmatique, l’État‎ tunisien s’appuyait sur un réseau d’organisations sociales et sécuritaires (« les amicales ») qui était directement reliées au parti unique (le Parti socialiste destourien créé par Bourguiba en 1934) ou aux instances gouvernementales (le ministère de l’Intérieur, le ministère des Affaires étrangères et le ministère des Affaires sociales).

Ce « système d’amicales », implanté dans les principaux foyers d’émigration tunisienne en France (Paris, Lyon, Grenoble, Marseille, etc.) répondait moins à une visée philanthropique qu’à une volonté de maintenir chez les migrants une allégeance inconditionnelle à la nation d’origine. La principale mission de ces amicales était donc d’entretenir le « mythe du retour »36 et de combattre les influences politiques, idéologiques et syndicales de la société d’accueil, jugées néfastes et contraires à l’intérêt national tunisien. Selon une logique de mobilisation totale, l’allégeance au pays d’origine se confondait souvent avec la soumission au parti unique et au régime en place. Il est vrai, toutefois, que dans l’euphorie nationaliste des premières années de l’indépendance, les émigrés tunisiens ont souvent adhéré au « système amicaliste », parce qu’il répondait très largement au « projet bourguibien », fondé sur une vision romantique et exclusiviste de l’identité nationale37. Dans ce contexte d’émulation nationaliste postindépendance, la question de la binationalité n’avait pas lieu d’être : elle était mentalement inconcevable, perçue comme une « trahison identitaire » ou comme l’expression d’un « reniement national ». Le contexte postcolonial a sans doute contribué à légitimer cette conception exclusiviste de la nationalité : le principal pays d’immigration (la France) étant aussi l’ancienne puissance coloniale, l’intégration sociale des émigrés tunisiens était interprétée comme une insulte à la mémoire nationaliste et la binationalité comme une forme d’indignité nationale.

Avec le recul historique, quoique l’on pense de « l’efficacité sociale » de cette politique de perpétuation des allégeances nationales, elle a produit des effets bien réels en termes de conscientisation et de socialisation des émigrés tunisiens et de leurs enfants. Elle a contribué à inculquer une forme d’idéologie nationaliste en terre d’émigration, cultivant une conception nostalgique et romantique de l’attachement à l’État‎ d’origine. Ce « nationalisme à distance », selon la formule de Benedict Anderson38, n’a pas seulement eu des répercussions dans la sphère publique (action des amicales et des réseaux consulaires), il s’est aussi invité dans la sphère intime et familiale par la volonté des parents émigrés de délivrer à leur descendance une éducation nationaliste, leur transmettant l’amour de la patrie d’origine (al-watan) :

« en outre, on peut émettre l’hypothèse selon laquelle la nostalgie de la mère patrie nourrit, chez ces migrants aux effectifs toujours plus massifs, le sentiment nationaliste, de sorte que les communautés déplacées seraient encore plus enclines à l’activité nationaliste que celles qui sont restées au pays »39.

Toutefois, à partir du milieu des années 1980, les fondements de ce « nationalisme exclusif » ont commencé progressivement à s’effriter sous le double effet de la crise de légitimité du régime bourguibien (montée en puissance des contestations populaires) et du processus d’inclusion des émigrés tunisiens et de leurs enfants dans la société française.

2. Désenchantement national et perte d’influence du système amicaliste : la binationalité comme émancipation ?

Dès la fin des années 1970, l’État‎ tunisien est confronté à une crise de légitimité multidimensionnelle (politique, sociale et économique) qui produit des conséquences directes sur la relation qu’il entretient avec ses émigrés et ses expatriés. Désormais, la gestion des allégeances se voit de plus en plus contestée par les migrants eux-mêmes et surtout par leur descendance socialisée dans l’Hexagone, qui remettent de plus en plus en cause les conceptions homogénéisantes de l’identité nationale40 et les modes de gouvernance autoritaires à l’intérieur comme à l’extérieur du pays d’origine.

Ce processus de distanciation des migrants à l’égard de la mère-patrie et du nationalisme exclusif a été décrit avec force et pertinence par l’écrivaine tunisienne Héli Béji sous la formule de « désenchantement national » : « Élevée dans le culte de ce qu'on appelle un ‘pays neuf’ comme dans une demeure dont j'ai cru pouvoir bâtir peu à peu l'image dans la réalité, et vivant cette construction comme celle de mon être propre, je découvre que les concepts auxquels j'attribuais une valeur, comme progrès, histoire, raison, lumières, etc., sont comme des clous rigides qui tentent vainement de fixer une réalité de plus en plus impalpable et glissante ».41 Toutefois, ce phénomène de désenchantement national, qui touche une partie des émigrés tunisiens, à l’horizon des années 1980, constitue moins un acte d’opposition politique au régime bourguibien qu’une forme de distanciation existentielle (routinisée par les pratiques sociales), due à leur intégration objective dans les divers champs sociaux de la société d’accueil.

En effet, les migrants tunisiens s’intègrent de plus en plus aux enjeux sociaux, politiques et citoyens des pays d’accueil, sensibles aux principes et aux valeurs démocratiques des État‎s européens, favorisant chez eux l’émergence d’un regard de plus en plus critique sur la gestion autoritaire de l’État‎ d’origine. A partir des années 1990, malgré le caractère relativement récent de l’immigration tunisienne dans l’Hexagone, certains migrants et leurs enfants décident même d’acquérir la nationalité française bénéficiant du jus soli (droit du sol pour les enfants nés en France) ou de procédures de naturalisation relativement libérales à l’époque42. De plus, l’assouplissement de la législation française (loi du 9 octobre 1981)43, qui permet aux étrangers des créer des associations sans autorisation préalable du ministère de l’Intérieur, favorise l’apparition au sein des populations issues de l’immigration maghrébine de nombreuses organisations citoyennes plus ou moins indépendantes à l’égard des État‎s d’origine : plusieurs centaines d’associations sont créées en l’espace de quelques années entre 1981 et 1990[44]. Désormais, le système des amicales et des organisations officielles directement contrôlées par le régime en place se voit concurrencer par un mouvement associatif « autonome » qui ne dépend plus directement des autorités du pays d’origine (consulats et amicales).

C’est donc dans ce contexte de crise profonde du système amicaliste et des modes de gouvernance autoritaire de la question de l’émigration, que le régime de Zine-el-Abidine Ben Ali tente de réorganiser et de redynamiser la politique d’allégeance à l’égard des expatriés et des binationaux.

3. L’héritage Ben Ali : entre normalisation sécuritaire et relance culturelle de la politique d’allégeance

Il est vrai qu'après la destitution de Habib Bourguiba et l'arrivée au pouvoir du président Ben Ali, en novembre 1987, les institutions représentatives des Tunisiens à l'étranger ont connu une certaine rénovation. Le pouvoir benaliste conscient de l'usure des anciennes structures a encouragé un renouvellement partiel des cadres de l'Amicale, en faisant appel à de nouvelles têtes dirigeantes. C’est précisément dans ce contexte, qu’est créé en 1988, une nouvelle organisation paragouvernementale, l’Office des Tunisiens à l’étranger (OTE), qui prend notamment en charge directement la question des binationaux45.

Durant les vingt-trois ans du régime de Ben Ali (1987-2011), l’OTE a ainsi représenté l'institution centrale de la politique tunisienne en matière d’allégeance et de gestion socioculturelle de l'émigration. Elle bénéficie d’un double ancrage territorial dans le pays d'accueil et dans la société d'origine, où chaque représentation consulaire et gouvernorat tunisien dispose d'un « délégué-OTE ». Pour le régime de Ben Ali, il s'agit, d'une part, de prendre en charge l'émigration en France en favorisant le développement de structures socio-éducatives et, d'autre part, de superviser les retours périodiques au bled, conçus comme une forme de ressourcement culturel et patriotique (séjours et cours d’arabe gratuits pour les enfants et les adolescents).

Pour ce faire, l'OTE entend assurer une continuité de son action à la fois dans le temps et dans l'espace : la protection et la promotion de la tunisianité des émigrés et de leurs enfants sont envisagées comme une œuvre quotidienne, susceptible de s'exercer en tout lieu, dans la société française, comme en Tunisie. Conscients que les nouvelles générations binationales s'intègrent inéluctablement aux sociétés d'accueil et que s’ils s’émancipent des instances de l’État‎ tunisien, les responsables de l'OTE ne ménageront pas leurs efforts pour encadrer les émigrés et leurs enfants dans les structures officielles.

Contrainte de gérer cette distanciation inéluctable des binationaux à l’égard de l’État‎ d’origine, l'OTE en vient à jouer sur deux registres complémentaires, celui du patriotisme hérité de la période Bourguiba et celui de l'exotisme tunisien (le jasmin, la chéchia46, l’image de Sidi Bousaïd ou désert tunisien, etc.) qui cherchent à présenter une vision valorisante du pays d’origine, à l’instar de celle qui est vendue aux touristes européens. Les campagnes de l'OTE, via la télévision nationale par satellite (la chaîne Canal 7 est reçue par de nombreuses familles tunisiennes en France), ressemblent de plus en plus à des publicités d'agence de voyage, où la Tunisie se trouve doublement promue comme « mère-patrie » et « pays exotique »47.

Durant la période estivale, les chaînes publiques tunisiennes diffusent des émissions quotidiennes sur le retour temporaire des émigrés au bled. La plus connue d'entre elles a pour cadre le port de la Goulette dans la banlieue nord de Tunis: un journaliste, accompagné d'une assistante, réalisent des micros-trottoirs à la sortie du bateau, distribuant des jasmins et des chéchias en porte-clefs à l'emblème de la Tunisie (croissant et étoile blancs sur fond rouge). La question la plus fréquemment posée par le journaliste aux émigrés et binationaux est : « Est-ce que tu aimes la Tunisie ? ». Et la réponse des interviewés est indubitablement la même : « Qui n'aime pas son pays ? ». L'image du vieil instituteur bourguibien tapant à coups de règle sur les doigts des enfants émigrés n'arrivant pas à prononcer correctement un mot en arabe tend à disparaître au profit de celle du jeune instituteur dandy, à peine plus âgé que ses élèves, enseignant la langue d'origine avec le sourire et distribuant des bouquets de jasmin pour les récompenser de leur assiduité.

Toutefois, ces campagnes officielles sur un registre mi-patriotique, mi-exotique, ne doivent pas faire oublier les dimensions à la fois politique et économique de l'action de l’État‎ tunisien en direction de ses émigrés et de ses binationaux : la course aux « devisards »48 et la perpétuation d'une logique de contrôle sécuritaire restent les principaux ressorts et objectifs de la politique d’allégeance. Le parti unique n’a d’ailleurs pas complètement disparu mais il a connu une mutation pour s’adapter aux réalités migratoires et binationales. C’est ainsi qu’en 1988 est créée le Rassemblement des Tunisiens en France (RTF), qui sous couvert d’association loi 1901, est en réalité une émanation directe du parti présidentiel, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), lui-même héritier du Parti socialiste destourien (PSD) de Bourguiba. Dans les premières années du régime de Ben Ali, le RCD a d'ailleurs bien compris l'intérêt de récupérer ce mouvement de sympathie des binationaux à l'égard du nouveau régime en impulsant la création d'une instance sans véritable attribution : le Conseil supérieur des Tunisiens à l'étranger, placé « sous le patronage du président de la République », selon formule consacrée en Tunisie, sera en réalité une coquille vide.

À ‎partir de 1991-1992, avec le verrouillage de l’espace public (répression policière contre les islamistes finissant par toucher toutes les formes d’opposition), les vieux réflexes sécuritaires reprennent progressivement le dessus dans la politique d’allégeance. Les espoirs suscités par le « Changement du 7 novembre » s’envolent chez de nombreux émigrés tunisiens et binationaux.

L’enthousiasme des premières années du benalisme cède la place à un climat de peur et de résignation. Concernant les communautés tunisiennes à l’étranger, le rôle majeur est désormais dévolu aux attachés sociaux des consulats qui, sous des apparences de gestion sociale, représentent l’œil du régime. L'attaché social est l'homme à tout faire. En principe, c'est un fonctionnaire du ministère des Affaires sociales. En réalité, il est choisi en fonction de sa fidélité au régime.

C'est aussi l'œil du parti qui ne laisse aucune autonomie aux autres initiatives. Les structures amicalistes connaissent une évolution similaire, consacrant le retour d'une logique d'encadrement politique et sécuritaire au détriment de l'action culturelle en milieu émigré. De plus, dans un contexte international où le régime tunisien fait de plus en plus l'objet d'attaques de la part des ONG des droits de l'Homme (Amnesty International, Fédération internationale des droits de l’homme, Reporters sans frontières, etc.), les institutions tunisiennes à l'étranger tendent à redevenir une pièce-maîtresse dans la politique la défense de l'image de l’État‎ tunisien face à la montée des critiques49. Les binationaux sont sommés d’adhérer à l’idéologie de « l’ère nouvelle » promue par les instances officielles : l’allégeance nationale se confond de plus en plus avec l’allégeance au système autoritaire et à la personne du président Ben Ali. Même si la plupart de ces organisations pro-régime font figure de coquilles vides sans véritables adhérents et militants, elles n'en remplissent pas moins une fonction de soutien au pouvoir en place, mobilisant ponctuellement les émigrés et les binationaux.

À ‎la fin des années 1980, la Tunisie, à l’instar des autres pays du Maghreb (Algérie et Maroc), a donc été conduite de substituer à sa politique exclusiviste et rigide de gestion des allégeances nationales une nouvelle politique plus réaliste et pragmatique, prenant davantage en compte des aspirations pluralistes des émigrés et des binationaux. Dans cette perspective, le président Zine-el-Abidine Ben Ali a entamé au début de son règne une réforme en profondeur des institutions de la diaspora, en créant de nombreuses associations satellites et en favorisant des retours temporaires des migrants, via l’OTE, sous la forme de séjours linguistiques et culturels dans le pays d’origine. Les actions sociales au profit des Tunisiens de l’étranger et des binationaux (registre philanthropique) se sont ainsi combinées à des actions de surveillance (registre sécuritaire), dans le but de maintenir les émigrés et leurs enfants dans le giron du régime.

Cependant, ces réformes tardives de la politique d’allégeance ont été impuissantes à enrayer le phénomène de désaffection à la fois culturelle, politique et sociétale des émigrés et des binationaux à l’égard de l’État‎. La contestation des modes autoritaires et paternalistes de gouvernance, qui a éclaté dans le pays d’origine, a très largement gagné les communautés tunisiennes à l’étranger. Si ces protestations ne se sont pas toujours exprimées de manière visible, elles ont été latentes : la « révolution silencieuse » du début des années 2000 a annoncé le ralliement des binationaux aux mouvements protestataires des années 2010-2011.

4. La politique d’allégeance nationale à l’épreuve de la Révolution et de la transition

Comme nous l’avons vu précédemment, les binationaux ont très largement participé aux mouvements de protestation qui ont emporté le régime de Ben Ali. Avant et après le 14 janvier 2011, ils étaient visibles dans les manifestations publiques appelant à la chute de la dictature et à l’amorce d’une transition démocratique en Tunisie. Cet engagement, certes tardif, mais visible des binationaux dans les mouvements anti-dictature a sans doute contribué à la refondation du mythe national, la nation tunisienne n’étant plus exclusivement définie par à rapport à des frontières territoriales mais en référence à un peuple ancré à la fois dans le territoire national d’origine et les territoires d’émigration et d’exil.

Ce mythe d’une identité nationale « transfrontalière » - à ne pas confondre avec le transnationalisme – a fonctionné pour un temps sur un mode unanimiste (référence à l’unité du peuple tunisien) et a produit des conséquences directes sur les manières de concevoir l’intégration nationale des binationaux : dès le début, ces derniers ont été appelés à participer aux nouvelles institutions de la démocratie tunisienne, que ce soit le Conseil de Protection de la Révolution, puis la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la Révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique (dite « Instance Ben Achour » du nom de son président) et à l’Assemblée nationale constituante, élue le 23 octobre 2011[50].

Dès novembre 2001, le premier gouvernement de la transition démocratique décide de créer un Secrétariat d’État‎ aux migrations et aux Tunisiens à l’étranger (dont le titulaire, Hocine Jaziri, est père de binationaux) et relance simultanément le projet d’un Conseil représentatif des Tunisiens de l’étranger qui serait élargi aux binationaux qui n’ont jamais vécu dans le pays d’origine51. Dans toutes ces institutions transitionnelles, les binationaux ont été reconnus pleinement comme électeurs et éligibles, sans que cela fasse débat contradictoire52. Au contraire, dans les premiers mois de la Révolution, les binationaux ont même joui d’un statut symboliquement valorisé dans l’espace public tunisien, du fait que figuraient parmi eux de nombreux dissidents et opposants historiques à la dictature, comme par exemple les membres du parti islamiste réformiste Ennahda, qui ont connu l’exil forcé durant les vingt-trois années du régime de Ben Ali, ou encore les anciens militants d’extrême gauche qui avaient pris majoritairement la nationalité française. Dans ce contexte d’effervescence révolutionnaire et démocratique, la binationalité n’est plus vécue comme une « nationalité amputée » ou une « nationalité de papier » mais, comme l’expression d’un attachement encore plus profond à la nation d’origine que le temps et l’éloignement géographique ne sont pas parvenus à effacer.

Toutefois cette euphorie démocratique à l’égard des binationaux présentés comme co-acteurs de la Révolution masque, en réalité, de nombreux non-dits et malentendus.

D’une part, parce que la catégorie binationale recouvre des trajectoires migratoires et des statuts sociaux très hétérogènes. Au regard des premières données biographiques recueillies par les chercheurs, les binationaux qui ont véritablement « fait leur place » dans les nouvelles institutions de la transition sont ceux issus de l’émigration étudiante et intellectuelle, qui ont généralement vécu dans le pays d’origine jusqu’à leur majorité. Tandis que les enfants issus de l’émigration économique sont peu représentés, voire quasiment exclus des nouvelles instances. D’entrée, les descendants de travailleurs émigrés ont été frappés d’illégitimité, du fait d’une faible maitrise de la langue arabe dialectale (darija) et littéraire (fousha) mais aussi de nombreux préjugés culturalistes et misérabilistes véhiculés à leur encontre, les présentant comme des individus « entre deux cultures », incapables de s’intégrer ici et là-bas. En dépit de trajectoires de mobilité sociale ascendante, les enfants de l’émigration économique ont été frappés de « double illégitimité » évoquée par Abdelmalek Sayad, alors que ce sont précisément eux qui auraient pu apporter des compétences et des savoirs en matière de gouvernance démocratique.

D’autre part, parce que la « ressource binationale » est profondément ambivalente et réversible. Valorisée dans les premiers temps de la Révolution sur le mode de la communion patriotique et du retour de tous les Tunisiens dans le giron national, très rapidement elle a fait l’objet d’accusation et de mise en suspicion, entretenant des visions complotistes, selon lesquelles les binationaux formeraient un « lobby » jouant contre l’intérêt national tunisien. La montée en visibilité des binationaux au sein des nouvelles instances parlementaires et gouvernementales a suscité de nombreuses « jalousies chauvines » et de controverses publiques, révélatrices de la prégnance de conceptions puristes de l’identité tunisienne, au point de faire des binationaux des boucs-émissaires des échecs de la transition politique, des problèmes économiques et de la menace djihadiste53.

Pour toutes ces raisons, une analyse sociologique des usages publics de la binationalité doit s’efforcer de rendre compte de la diversité des contextes d’énonciation, de la multiplicité des stratégies des acteurs sociaux et surtout des processus de réversibilité. Dans la période actuelle, où nous vivons des crispations anxiogènes aussi bien dans les État‎s européens que maghrébins, se manifestant par des replis d’ordre identitaire et sécuritaire, la binationalité apparait pour ses porteurs comme une ressource précaire, voire risquée.

De quoi la binationalité est-elle le nom : post-nationalisme, transnationalisme, nationalisme à distance…?

Des recherches pionnières de Robert E. Park54 sur la double appartenance de l’individu-migrant aux études de référence de Benedict Anderson sur « le nationalisme à distance »55, en passant par les travaux plus récents de Gabriel Sheffer56, Nina Glick et Georges Eugen Fouron57, Denys Cuche, Stéphane Dufoix58 ou Riva Kastoryano59, tous soulignent la persistance des sentiments patriotiques chez les migrants et leurs descendants, y compris après plusieurs générations de résidence dans les sociétés d’immigration.

Ces auteurs ont montré que, contrairement au nationalisme diasporique tel qu’il s’est incarné, par exemple, dans l’expérience historique du sionisme aux XIXe-Xxe siècle, l’objet du « nationalisme à distance » n’est pas tant de créer un nouvel État‎ nation que de perpétuer au sein des sociétés d’immigration et d’exil un sentiment national à l’égard de l’État‎ d’origine. Pour cette raison, le « nationalisme à distance » ne constitue pas une invention ex-nihilo mais un prolongement du nationalisme de la patrie d’origine, qui n’exclue pas bien sûr des phénomènes de réappropriation et de réinterprétation critiques par rapport au nationalisme originel de la mère-patrie. Il ne se résume pas en une reproduction pure et parfaite du nationalisme du pays d’origine mais induit toujours une part d’innovation et de création, nourri et enrichi par l’expérience sociale de la migration et de l’exil : « le nationalisme reproduit et diffusé par les États d’origine des migrants se trouve réinterprété et réapproprié en situation d’immigration et de minorité, et, en retour, redéfinit le contenu du nationalisme du pays d’origine » 60.

Toutefois, nous refusons de souscrire aux thèses « à la mode » du transnationalisme ou du postnationalisme, comme si le « nationalisme à distance » induisait nécessairement un dépassement du cadre de l’État‎-nation. Au contraire, et c’est l’une des conclusions principales de notre recherche, les mobilisations des binationaux véhiculent des enjeux et des logiques nationalistes totalement assumés qui, de manière paradoxale, réhabilitent doublement l’État‎-nation par une identification à la fois à l’État‎ de résidence (la France) et à l’État‎ d’origine (la Tunisie) : une binationalité affichée sans complexe mais, plus encore, un binationalisme revendiqué publiquement61.

De ce fait, les revendications portées par les binationaux n’expriment pas une négation ou un dépassement de l’État‎-nation mais, au contraire, ils constituent la preuve vivante de sa résilience dans les imaginaires individuels et collectifs des migrants et de leurs descendants. Sur ce plan, nous partageons l’approche critique de Kymlicka Will qui réfute catégoriquement les théories en vogue du « postnational » qui conduisent, selon lui, à une impasse théorique : « C’est précisément en tant qu’éléments de la nation, nés et élevés dans la mère patrie, qu’ils affirment leur droit à participer à la vie politique de celle-ci. Ils sont même, bien souvent, plus nationalistes que leurs compatriotes restés au pays et œuvrent à défendre sa souveraineté nationale contre ce qu’ils perçoivent comme l’« ingérence étrangère » des organisations internationales. Il n’y a là rien de vraiment « postnational » : c’est au contraire de la politique nationaliste dans tous les sens du terme. Cela signifie que ni le fait de plus en plus fréquent chez les migrants d’avoir la double nationalité ni leur activité politique croissante ne constituent un dépassement de la communauté nationale territorialement définie. Ces migrants sont très littéralement des binationaux, non des postnationaux, et tout indique qu’ils sont aussi attachés que n’importe quel sédentaire à l’idée que la politique se déploie avant tout dans un cadre national »62.

Certes, les phénomènes de mondialisation culturelle qui touchent aussi bien les pays d’immigration que les sociétés d’origine ont contribué à bouleverser la manière dont les binationaux conçoivent et vivent concrètement leurs identités nationales : celles-ci échappent de plus en plus aux interprétations exclusivistes et puristes et relèvent d’un processus d’hybridation. Mais la mondialisation n’a pas remis en cause fondamentalement les manifestations de nationalisme à distance63.

En définitive, les revendications binationales se fondent sur un mouvement dialectique combinant, d’une part, l’héritage nationaliste passé à un processus de réinvention identitaire permanent et, d’autre part, une double inscription imaginaire à la fois dans l’espace national de l’État‎ d’immigration et dans celui de l’État‎ d’origine. Le référent national se retrouve doublement valorisé ici et là-bas. Comment ne pas penser, en effet, que la résilience des pulsions populistes et nationalistes observée dans la majorité des État‎s européens, dont le France, ne contribuent pas à réveiller chez les binationaux un puissant sentiment d’identification aux État‎s d’origine (Algérie, Maroc et Tunisie), bien que celui-ci se limite généralement à des formes d’expression symbolique ?


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Notes

32 DUFOIX S., 2010, p. 41.

33 Le fait de renoncer à sa religion de naissance (irtidâd en arabe).

34 Enseignement des langues et cultures d’origine procédant d’accords bilatéraux entre l’État‎ français et les État‎s d’origine (Algérie, Maroc, Tunisie, Turquie, etc.).

35 SAYAD A., 1999.

36 SCHAEFFER F., 2001, p. 165-176.

37 ABASSI D., 2005.

38 ANDERSON B., 1998, p. 58-74.

39 DIECKHOFF A., JAFFRELOT C., 2004, p. 129-130.

40 KASTORYANO R., 2006, p. 544.

41 BÉJI H., 1982, p. 73.

42 WEIL P., 2003, p. 321-331.

43 PONTY J., 2003, p. 24-25.

44 WIHTOL DE WENDEN C., 1988.

45 L'Office des Tunisiens à l'étranger (OTE) est créé en juin 1988 par l’article 14 de la loi n° 60-88 du 2 juin 1988, avec « pour mission générale de fournir au gouvernement les éléments et les données lui permettant de mettre en œuvre une politique d'encadrement et d'assistance aux Tunisiens résidents à l’étranger » : http://www.ote.nat.tn/index.php?id=68

46 Couvre-chef traditionnel en laine dont la Tunisie est la principale productrice et exportatrice dans le monde. Généralement, la chéchia est rouge, rappelant la couleur du drapeau tunisien.

47 HORCHANI-ZAMITI M., 1993, p. 790-796.

48 Ce terme désigne en dialecte franco-tunisien les détenteurs de devises étrangères.

49 Comme par exemple, l'Association de défense des Tunisiens à l'étranger (ADTE), dont l’objectif principal n’est pas tant de défendre les intérêts des émigrés et de leurs enfants que de riposter aux attaques lancés par les milieux dissidents contre le régime de Ben Ali.

50 PEREZ D., 2014. POUESSEL, S., 2016.

51 LIMAM W., 2015.

52 Selon les articles 53 et 54 de la nouvelle Constitution tunisienne, les binationaux sont électeurs et éligibles à l’Assemblée des représentants du peuple (chambre unique du parlement). En revanche, selon l’article 74, en cas d’élection à la magistrature suprême (la présidence de la République), ils doivent renoncer à leur deuxième nationalité. L’article de la Constitution est formulé ainsi : « La candidature à la présidence de la République est un droit pour toute électrice et pour tout électeur jouissant de la nationalité tunisienne par la naissance, et étant de confession musulmane. Le jour du dépôt de candidature, le candidat doit être âgé de 35 ans minimum. S’il est titulaire d’une autre nationalité que la nationalité tunisienne, il doit présenter dans le dossier de candidature un engagement stipulant l’abandon de l’autre nationalité à l’annonce de son élection en tant que Président de la République ». Source : http://majles.marsad.tn/fr/constitution/5/article/74

53 « La double nationalité provoque des cris et des jets de papiers à l'ANC », Business News, 20/01/2014 : http://www.businessnews.com.tn/la-double-nationalite-provoque-des-cris-et-des-jets-de-papiers-a-lanc-video,534,43690,3

54 PARK R. E., cité par CUCHE D., 2009.

55 ANDERSON B., 1988.

56 SHEFFER G., 2003.

57 GLICK SCHILLER N., FOURON G. E., 2001.

58 DUFOIX S., 2010.

59 KASTORYANO R., 2006.

60 KASTORYANO R., 2006, p. 539.

61 Souligné par l’auteur.

62 WILL K., 2004, p. 100.

63 BEAUZAMY B., 2014, p.79.

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