Après les barons de la contrebande, ce sont les rentiers sans scrupules qui veulent maintenant la peau de Youssef Chahed, après que le gouvernement eut décidé de privilégier l'extension du port de Radès au lieu de la construction d’un port des eaux profondes à Enfidha.
Les acquéreurs de terres non-arables et de terres agricoles à Enfidha à des fins d’agiotage, se sont montrés particulièrement en colère la semaine dernière, dont certains ont accouru aux radios pour accuser Youssef Chahed de complicité dans des manœuvres de malversation, allant jusqu’à lancer des calomnies à son égard. Grands spéculateurs semblent craindre de ne pas réaliser les méga plus-values projetés.
Des bruits de couloir laissent entendre qu'une triangulation du dossier par le Prince héritier aurait été adoptée par les seigneurs de la spéculation foncière ces derniers jours, ce qui pourrait faire avorter la décision du gouvernement.
Il y a lieu de rappeler que le projet du "port des eaux profondes d’Enfidha" avait été initié par le lancement d’un appel à manifestation d’intérêt pour la réalisation de l’investissement sous la forme d’un full BOT, sans dépenser le moindre dinar sur le budget de l’Etat pour sa réalisation. Le coût global du mégaprojet a été estimé à plus de 3 Milliards de dollars américains, niveau sous-estimé d'après d'éminents spécialistes en la matière.
A présent, la démarche de concrétisation du projet change bizarrement dans le mauvais sens. La réalisation de ce port est non seulement maintenue, mais encore elle sera financée sur les moyens propres de l’Etat à travers la Caisse de Dépôt et de Consignation (CDC) et 6 autres entreprises publiques en lien direct avec le domaine portuaire. Une société de développement et d’exploitation du port sera prochainement créée au capital social de 360 M²D.
Toutefois, les candidats au BOT ne semblent pas se bousculer sur ce projet, d’une part pour des raisons évidentes d’ordre géopolitique, et d’autre part à cause de l’existence dans le bassin méditerranéen de nouveaux ports de capacité similaire à 18 mètres de profondeur (Malte, Tanger, …) et présentant de meilleurs indicateurs de rentabilité.
Par conséquent, l'Etat Tunisien serait amenée par les "spéculateurs terriens" à en être le promoteur principal. Cependant, il ne pourra en assurer le financement de par l’absence de ressources propres adéquates et l’impossibilité de lever des crédits sur le marché international eu égard au rating souverain et au risque pays.
Le lobbying le forcera à vendre ce qui reste des bijoux de la famille pour former un minimum de fonds propres susceptible d’améliorer la structure de financement et de susciter l'intérêt de fonds d’investissement à profil spéculateur.
Ce faisant, la première phase du projet (acquisition de terrain et travaux de drainage) trouvera probablement financement de quoi désintéresser les spéculateurs terriens, qui vont faire fortune en réalisant des plus-values colossales.
Cependant, les phases ultérieures ne pourront séduire aucun investisseur ni fonds vautour et ce, de par la non viabilité économique du projet et sa non rentabilité financière. En effet pour concurrencer les ports existant, ce projet doit passer à une profondeur de 22 mètres pour pouvoir recevoir les cargos géants (nouvelle génération) navigant dans des eaux de profondeur de 20 mètres.
L'interruption du chantier, pour absence de financement, conduira vraisemblablement à un dérapage du coût du projet, qui pourrait motiver sa mise en veilleuse en attendant des jours meilleurs.
En conclusion, ce projet n’a fait qu'attirer les spéculateurs fonciers, qui ont acquis des terrains à bras le corps, ainsi que des prestataires de services (bureaux d’études, consultants, …) qui ont reçu leurs parts du gâteau, non sans corrompre au passage, des décideurs de l'administration et quelques hommes politiques influents.