Derrière la fumée "réformiste" de Mohamed Ben Salman

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Mohamed Ben Salman, le prince héritier saoudien, organise un concert auquel les femmes pourront assister ? En s’y rendant de surcroît, comme leurs homologues de la planète tout entière, au volant de leur voiture ? Ne boudons pas notre plaisir (et le leur !).

Il ne faut bien évidemment pas nier l’importance ou sous-estimer l’intérêt de cette libéralisation tant attendue – fut-elle encore très partielle - du statut des femmes dans l’un des royaumes les plus conservateurs du monde. Attention tout de même à ce que ces mesures fortes, destinées notamment aux Occidentaux, ne soient pas autant de signaux de fumée derrière lesquels ce prince va-t’en guerre tenterait de cacher une politique, notamment étrangère, particulièrement irresponsable.

Ben Salman a la chance exceptionnelle que son obsession anti-iranienne soit largement partagée par les Etats-Unis et par leurs alliés, dont Israël. Cela et les contrats d’armement dont il gave littéralement les Occidentaux, Américains en tête, lui vaut une liberté sans limite : celle de mettre le feu à la région et notamment à l’un des pays les plus pauvres du monde, le Yémen.

Sous prétexte d’y rétablir les droits de ces révolutionnaires qu’il a combattus partout ailleurs, en fait au nom de la lutte contre un allié potentiel de l’Iran, le pauvre Yémen s’est vu martyrisé – entre autres - par plus de 15 000 frappes aériennes soit autant que les Etats-Unis en ont déversé sur la Syrie ou l’Irak pendant la même période.

On a vu l’irresponsabilité avec laquelle, au risque de faire replonger le Liban dans la guerre, Mohamed Ben Salman a «kidnappé » récemment le Premier ministre Hariri pour le détourner de toute coexistence pacifique – si indispensable soit-elle à l’équilibre du pays - avec le Hizbollah.

A l’intérieur du royaume, les mesures autoritaires s’enchainent. Et, pour la première fois au nom de la lutte contre la corruption, celui qui a récemment fait l’acquisition, sur un coup de tête, d’un yacht d’un demi-milliard de dollars, après avoir frappé des pans entiers de l’opposition islamiste réformiste, a introduit la violence politique jusqu’au sein du groupe dirigeant.

Se réjouir pour les femmes saoudiennes, certes. Restons néanmoins vigilants sur le sort des hommes de ce même pays. Et de millions d’hommes et de femmes, au Proche-Orient ou ailleurs, menacés par celui qui tente de masquer opportunément derrière quelques mesures féministes son inquiétante mégalomanie politique.

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