Editorial Municipales : circonspection, pas démission

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Nous sommes à la veille d’un rendez-vous crucial dans le processus de transition politique du pays. A travers l’expérience de la démocratie locale, le Tunisien va découvrir ce qu’il avait tellement peu découvert jusque-là : la capacité de sa voix et de son soutien en tant que citoyen à transformer le quotidien de sa vie à l’échelle d’une ville et d’un quartier...

C’est la démocratie à visage humain, où les décisions à prendre, les choix entre tel ou tel projet, l’engagement en faveur de telle option, tout cela revêt des enjeux concrets par rapport à quoi on a souvent sa propre opinion, sans avoir besoin de se la forger par l’intermédiaire de telle ou telle autorité intellectuelle qui aurait tel ou tel positionnement idéologique…

Le vote, qu’on est invité à exprimer dimanche prochain, ne sera en réalité que l’acte inaugural d’une expérience d’accompagnement positif, et néanmoins critique, par rapport à une action dont le but est un meilleur vivre-ensemble auquel tout le monde participe... La dimension de proximité ouvre la voie à une plus grande implication, là où la démocratie parlementaire pouvait donner le sentiment qu’une fois son vote donné, le citoyen était repoussé dans le rôle du spectateur passif: on a utilisé sa voix pour qu’il n’ait plus voix au chapitre!

Les élections municipales ne permettront pas cette confiscation. Au contraire, elles vont servir d’initiation à un vote synonyme d’évaluation continue, dont l’acte final, aux élections suivantes, prendra la forme d’une sanction, favorable ou défavorable…

Bien sûr, cette étape nouvelle ne plaît pas à tout le monde. Elle ne convient pas en particulier à toux ceux pour qui la vie politique n’a d’intérêt qu’en étant installé dans son fauteuil et en critiquant les uns et les autres, en invectivant et en vomissant sa bile contre la «trahison» de tel ou tel, la «bassesse» de tel ou tel autre...

Ils pressentent que ce confort-là va bientôt passer d’époque et que le débat politique va désormais prendre une forme nouvelle, où il s’agira d’engager sa position et ses convictions sur des questions d’où l’utilité publique n’est jamais absente...

Ce sont ces gens-là qui, sur les réseaux sociaux ou ailleurs, n’hésitent pas à appeler les Tunisiens à bouder les élections, en se donnant des airs d’avisés qui nous mettent en garde contre la «supercherie». Parce que, disent-ils, désormais dans les municipalités, on va voler et se livrer à toutes sortes de méfaits en notre nom et en se prévalant du mandat qu’on leur aurait conféré.

Bien sûr, ce jugement sévère dont ils gratifient à l’avance les candidats ne correspond à aucune investigation préalable : ils n’ont généralement assisté à aucune réunion, ils ne se sont enquis d’aucun profil particulier ni d’aucun programme, n’ont débattu sérieusement avec personne sur la réelle capacité de telle équipe à honorer ses promesses malgré son inexpérience et le peu de soutien dont elle bénéficie, mais en étant quand même armée de l’énergie de celui qui y croit et qui veut relever le défi en mobilisant autour de lui...

Partout, ils promènent sur le monde le pessimisme de leur regard et ne veulent pas croire que l’obscurité qu’ils y voient n’est que l’expression d’une lumière qui s’est éteinte en eux. Face à leur âme assombrie s’arrête le corrosif de leur regard, pour se muer en une totale complaisance !

Pour notre part, nous appellerions à faire preuve de circonspection, tout en se souvenant que la liste la meilleure — celle qui, plus que tout autre, est capable de transformer le quotidien de la ville en une réalité plus conviviale et plus riante — a sans doute besoin de larges suffrages pour disposer des moyens de ses ambitions…

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