Jusqu’à la page 150 de ce rapport si long et parfois insipide, avec usage fluide de dizaines de concepts composites : pudeur, liberté, morale, crime, modernité, équité, égalité, légitimité,..., ne faisant pas l’objet de consensus dans le système de langage social, je retiens pour le moment :
(1) La nécessité d’approfondir des passages ayant trait à la dimension sociologique dont la composante identitaire requiert plus de rigueur car confuse, de statut car non construite, et de méthodes devant s’inspirer des références appropriées et précises, ou de choisir un référentiel théorique ou appliqué unique et cohérent,
(2) le besoin de revoir l’approche méthodologique, basée sur des hypothèses implicites peu réalistes car non soutenues statistiquement,
(3) la lecture presque mécanique des interactions individuelles séparant les citoyens en entités indépendantes et potentiellement conflictuelles. Le texte, ici, gagnerait en franchise et en raccourci s’il avait cité explicitement Bentham et sa Théorie « du sentiment moral » ayant donné lieu par la suite au subjectivisme individuel,
(4) prédominance de la dimension hédoniste sur celle fondamentalement humaine plus large, complexe et multidimensionnelle,
(5) la portée très limitée, vraisemblablement due au défaut d’analyse et de démonstration, de ce qui est convenu d’appeler l’interprétation de « Maqassed Al-Shariaa », relayant des principes universels a-historiques n’épargnant aucune spécificité à l’Islam par rapport aux diverses (i) doctrines, (ii) religions, et (iii) idéologies, parfois introduites en filigrane mais de manière partielle voire tronquée,
(6) certaines recommandations ne coulent de source, puisque parachutées et à effets attendus mitigés,
(7) les auteurs du texte n’ayant pas nécessairement la notoriété de leadership parmi l’élite intellectuelle pendant la crise actuelle de l’intellectualisme, font l’éloge de la Présidence de la République; ce qui les fait glisser vers l’idéologie qui est, ici, le contenu de l’aliénation politique réduisant ainsi la scientificité de leur discours. Ceci serait évident quand le travail est rémunéré,
(8) enfin, l’aspect « juridique technique » très simpliste réduisant les «concepts» à des «appellations» mettent le rapport dans un défaut potentiel de consensus social.
Bien sûr, ceci ne remet aucunement en cause les initiatives savantes provenant de l’élite intellectuelle…
Mise au point:
Suite à cet article exprimant ma position préliminaire, par rapport au texte produit sur les libertés individuelles, articulée autour de quelques failles méthodologiques réduisant sa portée analytique et opérationnelle, des discussions très intéressantes « en privé » m’ont inspiré la mise au point suivante:
1- Le texte préparant un projet de loi isomorphe au code du statut personnel en vigueur, n’est ni sacré, ni divin ni porteur de solutions miracles à toute ou partie de la crise sociale actuelle dont l’identification est passée outre l’intérêt de ses auteurs. Des lectures critiques multiples et diversifiées ne feraient qu’alimenter le « débat » et le relever.
2- Les failles méthodologies et conceptuelles dont le texte est entaché (1) montrent l’exiguïté de la vision de ses auteurs, (2) imposent un approfondissement mais aussi un processus désaliénant.
3- Les aspects positifs qu’il contient sont d’ordre assez général et sont à la limite évidents, cependant les recommandations proposées sont en majorité à effets attendus mitigés et dont l’aspect prioritaire n’est nullement évident.
4- En même temps, nul ne peut nier la nécessité de valoriser les initiatives citoyennes de l’élite intellectuelle en faveur du progrès social.
5- Défendre le texte ou le rejeter sans l’avoir lu et/ou repensé objectivement serait du simple dogmatisme (voulant dire: prendre son hypothèse de départ pour une vérité universelle), ou une position politique inconfortable car idéologique en substance (idéologie, dans le sens de l’aliénation sociale ou la partie non scientifique du discours) et difficilement soutenable.
6- La démarche aurait du être initiée par un débat collectif impliquant l’élite intellectuelle bénévole et les savants surtout dans le domaine de la sociologie moderne et ses filières, théologie, et autres..
7- Attendre que la société change pour agir c’est de l’opportuniste pur, ou faire en sorte que l’idéologie prédomine artificiellement les interactions entre individus, c’est se cacher sous l’arbre pour ne pas reconnaître l’existence de la forêt. Les deux manières de traiter les questions sociales ne produisent jamais une génération libre d’esprit qui crée sa propre histoire…