Synopsis de la transition démocratique 2011-2014 en Tunisie

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Ils connurent une défaite cuisante, au lendemain des élections du 23 octobre 2011 puisqu'ils furent soit réduits à la portion congrue soit rayés de la carte politique. Ces élections furent les premières vraiment libres qu'ait connu la Tunisie depuis l'indépendance et elles virent les partisans de l'islam politique l'emporter haut la main.

D'emblée les élus de l'assemblée constituante, ne réussirent pas à s'entendre pour former un gouvernement d'union nationale. Avec le recul, on peut à présent reconnaître que c'était vraisemblablement la seule alternative qui aurait permis d'apaiser les vives tensions partisanes et les inquiétudes légitimes du peuple tunisien, qui aurait mis à l'écart du pouvoir la réaction, qui aurait été conforme à l'esprit du moment historique que vivait alors les tunisiens : jeter ensemble les bases de la nouvelle Tunisie démocratique.

Mais le coche fut raté ! En fait, les uns, acceptèrent de former une coalition avec le parti Nahdha, des partisans de l'islam politique, les autres, la refusèrent catégoriquement en se réclamant aussitôt de l'opposition. Singulière idée de la démocratie que de refuser de gouverner, en ce moment si crucial pour le Tunisie, avec ceux qui avaient légitimement gagné les élections et d'autant plus surprenant venant de figures dites de l'opposition à la dictature d'antan !

Etait-il aussi logique de se placer dans l'opposition alors qu'on savait pertinemment que le gouvernement transitoire de l'époque et l'assemblée constituante n'étaient pas des instances qui avaient les prérogatives conférées par un mandat électoral habituel ? En fait cette période, aurait du être celle de la coalition entre tous les partis élus, celle du dialogue et du débat constructif aboutissant à des résolutions consensuelles engageant l'avenir du pays; mais malheureusement elle fut dévoyée par les positions partisanes des uns et des autres, les vieilles idéologies, les haines récurrentes, les égoïsmes et l'aveuglement que suscite la course au pouvoir et les intérêts personnels mesquins ... tout ceci au grand bonheur de la réaction qui commença alors aussitôt et méthodiquement son travail de sape.

Il y eut aussitôt et successivement les projections des films "Persepolis" et "ni Dieu ni maître" suivis plus tard d'une exposition artistique où des symboles de la religion musulmane étaient présentés de manière sciemment transgressive ... Tous les sujets polémiques abordés évoquaient l'aspect religieux pourtant la révolution était censée être celle de la dignité et de la liberté !

Le moment était-il adéquat pour décider d'aborder ces sujets polémiques vu que le peuple tunisien sortait de plus de 50 années de privation des libertés; que le musulman n'avait encore pas fait ni sa révolution culturelle ni sa révolution spirituelle, que les mentalités n'étaient encore préparées ni aux libertés, ni à la critique, ni même à la discussion, que le peuple tunisien n'était pas imprégné par sa véritable culture ?

Ils menèrent également dans les universités une campagne d'extermination du niqab, dont le port était à l'époque, il faut bien l'admettre, très insignifiant ; à titre d'exemple, dans un des plus grands campus universitaire du grand Tunis, seulement 0,3% des étudiantes en étaient affublées. C'est ainsi que, alors qu'on s'attendait à plus de libertés, ils ont, par toutes ces provocations et ces limitations aux libertés individuelles, poussé les conservateurs les plus extrémistes, dans une spirale de réactions plus ou moins violentes.

Du pain béni pour la réaction ! A chaque occasion, le parti Nahdha était désigné responsable des débordements ! Cet ogre allait nous dévorer et changer notre mode de société ! Il allait restituer une dictature ! Mais religieuse cette fois-ci ! Tout ceci n'était que supputation, puisque nous n'avions jamais connu de dictature religieuse en Tunisie, mais pour eux c'était une certitude inéluctable ! Leur phobie était telle que certains laissaient à penser qu'ils regrettaient la dictature de Bourguiba et de Ben Ali ! La politique de diabolisation des partisans de l'Islam politique, alors au pouvoir, monta crescendo dans les médias largement réactionnaires.

Une réaction encore très bien infiltrée dans les rouages de l'Etat profond, une opposition qui s'y était ralliée, une société civile taillée sur mesure pour des objectifs partisans et un ballet d'interventions étrangères, finirent par mettre à rude épreuve l'action des forces révolutionnaires et du gouvernement transitoire en sabordant toute tentative réformatrice.

Dans "la déclaration du processus de transition", 12 partis seulement sur les 110 partis présents alors sur la scène politique, avaient signé pour que la durée de la constituante soit fixée à une année; chose qui était irréaliste si on se réfère à des expériences précédentes similaires. Cette durée finira par constituer un alibi pour tout ceux qui voulaient coûte que coûte faire tomber le gouvernement provisoire et dissoudre l'assemblée constituante y compris par un coup de force.

Puis il y eut, pendant cette période de transition démocratique, sur le plan national, deux assassinats successifs de figures politiques nationales laïques et, sur le plan international, un coup d'état militaire en Egypte contre les partisans de l'Islam politique pourtant démocratiquement élus au pouvoir.

Concomitamment à ces faits tragiques, des mouvements répétés de rues dans la capitale fomentés par les élites réactionnaires auxquelles s'étaient ralliées les élites de l'opposition, furent largement surmédiatisés et surévalués. Des voix s’élevaient même, jusque dans les médias, appelant à la désobéissance civile et réclamant l'intervention de l'armée.

Tous ces coups de boutoirs finirent, par imposer un dialogue national et à la longue aboutirent à la formation d'un troisième gouvernement consensuel dont les membres furent désignés on ne sait trop comment. C'est ainsi qu'on fit admettre au peuple tunisien qu'une légitimité consensuelle pouvait se substituer à une légitimité électorale ... ceci bien évidemment au grand dam des purs et durs démocrates !

L'alliance contre-nature réaction / opposition qui en réalité avait pour seul but de mettre out le parti Nahdha puis de se partager le pouvoir ainsi que les tractations secrètes réaction / partisans de l'islam politique, pour également se partager le pouvoir, favorisèrent le retour en force au pouvoir des réactionnaires aux prochaines élections présidentielles puis législatives qui furent faussées par l'argent sale des partis.

Le comble, fut, qu'une fois au pouvoir, la réaction ainsi que deux autres partis satellites ne virent aucun inconvénient à se coaliser avec le parti tant honni des partisans de l'islam politique pour former le gouvernement de la seconde République, en dépit du fait que le chef de file de la réaction, devenu président, en avait catégoriquement exclu la possibilité dans sa campagne électorale !

Ce que les uns avaient compris, depuis le début du processus démocratique, à savoir qu'il n'y avait pas d'autre issue pour établir la démocratie en Tunisie que de composer avec le parti Nahdha, d'autres s’en sont seulement convaincus à présent et certains irréductibles le refusent encore.

Quels sont ceux qui avaient finalement raison ? Et quels sont ceux qui s'étaient attirés les foudres de la géhenne parce qu'ils avaient vu et fait juste ?

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