Après avoir dilapidé le capital symbolique de la lutte anticoloniale de l'Algérie (1954-1962), le régime est devenu la Corée du Nord de l'Afrique. Avec cette différence que la Corée du Nord assume son autoritarisme alors que le régime algérien prétend être démocrate et respectueux de la liberté d'expression.
Le journaliste Ihsane El Kadi arrêté en pleine nuit à son domicile par des individus se réclamant de la houkouma. Le grand problème politique de l'Algérie est que l'autorité publique, celle de l'Etat, est souvent exercée par des civils anonymes dont personne ne sait de qui ils dépendent.
Si Ihsane El Kadi a commis un délit ou a violé la règlementation en vigueur, c'est à la police et à la gendarmerie d'enquêter sur lui et de l'arrêter si l'enquête est probante. Pourquoi les policiers et les gendarmes ont une tenue qui les distingue?
C'est pour dire que ce ne sont pas des individus privés et qu'ils sont des agents de l'ordre public exerçant l'autorité de l'Etat dans le cadre de la loi. A ce titre, les citoyens obéissent à la loi en leur obéissant. Mais il y a des arrestations opérées par des civils portant des armes et qui prétendent être "el houkouma".
Ce mot est devenu dans le langage populaire "l'Etat profond" dont ont peur aussi les policiers, les gendarmes et les magistrats. Cet "Etat profond" est certainement le DRS qui est une institution dépendant du ministère de la défense. Mais pourquoi, quand ils arrêtent des personnes, ils ne portent pas la tenue militaire ou des insignes qui indiquent qu'ils appartiennent à une institution de l'Etat?
Faire exercer l'autorité de l'Etat par des personnes anonymes alimente les rumeurs les plus folles. La dernière en date qui circule à Alger est qu'il y a des milices parallèles qui dépendant de différents généraux. Personnellement je ne crois pas à cette rumeur, mais si le ministère de la défense veut éviter ce genre de rumeurs il doit rendre publiques les prérogatives officielles du DRS (qui a changé de sigles plusieurs fois) et le cadre juridique dans lequel interviennent ses agents.
Cela ne préjuge en rien du caractère injuste et arbitraire de cette arrestation qui indique un état d'affolement chez les décideurs qui ont peur d'un journaliste. L'affolement est tel que les formes légales ne sont pas respectées, à moins d'une perte de confiance dans la police et la gendarmerie.