C'est comme s'il ne s’était rien passé et que nous avions rêvé le cafouillage de la proclamation des résultats.
La cour constitutionnelle a procédé à un simple nettoyage des chiffres que l’ANIE avait donnés pour des résultats provisoires, comme un maître d’école bienveillant corrige au tableau les étourderies d’un de ses élèves.
Tout le monde s’en tire à bon compte. L’inexplicable taux de participation annoncé à 48% est tout juste ramené à 46%, rectifié d’à peine 500.000 voix, en somme une simple retenue comptée par erreur dans l’addition.
L’énigme suscitée par l’absence d’évaluation des suffrages annulés est résolue : les 6.130.000 votes nuls qui se déduisaient en creux des résultats provisoires sont réduits à la proportion plus vraisemblable de 1.760.000, ce qui permet largement de puiser dans le nouveau réservoir des suffrages exprimés de quoi donner satisfaction aux trois candidats : celui du MSP fait un bond de 179.000 à 904.000 voix et gagne 6 points et celui du FFS progresse de 120.000 voix à 580.000, soit un gain de 4 points.
Le président sortant quant à lui perd certes dix points à 84% mais les voies impénétrables de la comptabilité électorale lui font engranger près de 2.500.000 voix supplémentaires.
Préparée dans la connivence du cercle très fermé des candidats sélectionnés qui se sont scrupuleusement ménagés tout au long de la campagne, l’élection s’achève dans une parfaite concorde au sein de l’aréopage qui fait communier vainqueur et vaincus dans un enthousiasme proportionnel aux ambitions conçues par l’un et les autres.
On oubliera bien vite qu’entre les procès-verbaux des bureaux de vote et la salle de délibérations de la cour constitutionnelle un itinéraire tortueux a peu à peu chamboulé les résultats : un simple décompte de multiples petits gestes concrets effectués sur le terrain s'est mué en un casse-tête arithmétique résolu à huis-clos.
C’est à croire que les votants étaient de trop.