" Tous des voleurs ?! Expliquez-vous !"

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Remettons les choses à l'endroit. J'entends ici et là justice spectacle, mascarades judiciaires, règlements de comptes, shows judiciaires ou encore procès bidon. Je ne juge pas les affaires en cours car n'ayant pas accès aux dossiers. Je ne préjuge pas de l'issue de ces instructions.

Laissons à la justice faire son travail, il est parfois long. Ce que je constate ces derniers temps est que les oligarques qu'on a mis derrière les barreaux et ceux qui font l'objet d'enquêtes auraient dû être jugés du temps de Bouteflika. C'est durant la présidence de Bouteflika que des hommes d'affaires, des affairistes et des aigrefins ont pillé, détourné, volé, corrompu et amassé des fortunes avec l'argent public. Avec la bénédiction, l'encouragement et la complicité du système mis en place par Bouteflika et sa fratrie.

On a trop tardé pour leur demander des comptes. Parce qu'il a osé s'attaquer aux oligarques et à leur chef qu'un Premier ministre a été dégagé. Au bout de 80 jours. Les oligarques ont mis sa tête à prix, y compris en arrosant des journalistes, et l'ont obtenue. Avec la bénédiction, la complicité et le concours du frère du président.

Ce que je constate est que des Premiers ministres, des ministres, des sénateurs et des walis sont appelés aujourd'hui devant les juges pour s'expliquer. Je vais encore le rappeler parce que hélas nous avions raison : En 2003, j'avais mis à la Une de Liberté une galerie de responsables dont Bouteflika, son frère, Chakib Khelil, Ouyahia ou encore Said Barkat (ces quatre là font maintenant l'objet d'enquêtes) avec ce titre " Tous des voleurs ?! Expliquez-vous !".

On a failli me mettre en prison et fermer le journal. Oui, les explications devant la justice, c'était du temps de Bouteflika qu'il aurait fallu les donner. C'était durant le règne de Bouteflika que les pillages, les détournements, la corruption et la prévarication ont eu lieu.

Ce que je constate est que des intouchables, des puissants, des petits potentats, tous couverts, protégés, immunisés, soustraits à la loi, sont appelés à donner des explications et peut-être pour certains aller en prison. Ce que je constate est que ceux qui devaient veiller à la bonne gestion de l'argent public, faire appliquer les lois, veiller à ce qu'une justice équitable soit rendue, faire respecter les règles d'équité, de transparence, tout ce qu'ils n'ont pas fait et tous ce qu'ils ont combattu quand ils étaient en fonction, ceux là donc défilent et vont défiler devant les tribunaux pour être entendus et qui sait être jugés.

Je ne suis dupe de rien. Le système que Bouteflika a mis en place pendant 20 ans a tellement tout broyé, perverti, métastasé, clochardisé qu'on en vient à douter de tout et à désespérer de tout. Mais enfin, vous voulez quoi ? Que les puissants restent au chaud et à l'abri ? Que la justice croise les bras, ferme les yeux comme elle l'a fait du temps de la régence de Bouteflika ? Que ceux qui ont pillé l'argent des Algériens n'aient pas à rendre des comptes ? Règlements de comptes ? So what!

Vous avez vu une révolution où des comptes ne se règlent pas avec parfois brutalité, force et une certaine idée de vengeance. Peut-être que ces affaires et ces instructions feront pchiiit demain. Certainement que des milliards de dollars détournés ne seront jamais restitués au trésor public. Mais il y a dans la convocation des puissants d'hier une forme de catharsis. Elle guérit et soulage cette frustration, ce dépit et même cette colère de les voir piller et encourager la rapine sans devoir rendre de comptes.

Il y a dans ces convocations ce sentiment que des intouchables ne restent jamais intouchables. C'est du temps de Bouteflika que la justice aurait dû être rendue. Ce sont les hommes de Bouteflika qui se rendent aujourd'hui devant la justice.

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