L’on s’interroge souvent sur les raisons faisant que les pays occidentaux aient actuellement de ‘’Bonnes institutions’’, au sens de Smith, alors que ce n’est pas le cas dans les pays arabes.
Sans s’étaler sur les origines de l’Institution et son rôle dans le développement, un fait saillant mériterait attention, c’est que dès la genèse de l'ère moderne, l’Institution a favorisé l'accumulation de la richesse et le développement en Europe, et qu’elle s’est, depuis, développée davantage et modernisée.
Par ailleurs, l'avance actuelle prise par les pays de l'Europe du Nord sur l'Europe du Sud en matière de développement institutionnel et de fonds souverains, était initiée en concomitance avec la découverte des champs de pétrole de la mer du Nord le lendemain de la crise de 1973, renversant ainsi l'ordre des pays européens en termes de ''Bonnes Institutions''.
C’est cette prédisposition au développement institutionnel qui aurait fait que la manne du pétrole ne soit pas dilapidée et que ces pays ne soient pas trop exposés à la corruption. Bien au contraire, les ‘’bonnes institutions’’ ont fait que la rente venue soit allouée vers plus de progrès et les meilleurs politiques publiques.
Quant aux pays arabes, ils pourraient être distingués en ceux ayant initialement des richesses naturelles énormes, et ceux n’en ayant pas autant. Un constat : les institutions, bien qu’à développement limité dans les derniers, dont la Tunisie, le Maroc et la Jordanie, sont foncièrement relativement meilleures que dans les premiers.
Comme si nous étions dans une situation de rente abondante qu'il faudrait distribuer – par construction et définition-même de la rente–selon les besoins plus que le mérite, face à une situation de rareté de richesse qu'il faudrait se partager plutôt selon des mécanismes austères. Dans les deux cas, la stabilité sociale est prise pour une condition sine qua non à la reproduction de l'Etat, même si ce dernier est perpétuellement menacé de captation de ses institutions par les chercheurs de rente.
En revanche, la première situation (de rente abondante répartie selon les besoins) ne stimule nécessairement pas l'innovation et l'établissement de ''Bonnes institutions'', alors que la deuxième (de rareté de la richesse avec des institutions potentiellement meilleures) stimule nécessairement le développement institutionnel.
Certains pays ayant anticipé l’assèchement à terme de leurs sources de pétrole, se sont conduits à des stratégies de diversification de leurs revenus. Mais ceci dépendrait –à notre sens– de l'identification et la création d'Institutions efficientes, pour reprendre la terminologie de D. Noth, qui s’avèrent donc les véritables garants de reproduction de l’Etat, avec ou sans abondance de richesses naturelles.
C’est pour cela que la Tunisie a une opportunité à saisir pour aller de l’avant dans la mise en œuvre de réformes institutionnelles non seulement stimulatrices de la création de richesse et établissant une clef équitable de sa répartition, mais aussi adoptant des mécanismes garantissant l’initiative créative et élargissant l’espace de l’action réciproque inter-individus soutenant ainsi le processus de développement.