Nous prendre à témoin et devant les caméras, houspiller, rudoyer, humilier le chef du gouvernement est de la part du chef de l’état un acte choquant, indigne des mœurs civiques et policés d’une république.
Nous avons déjà vu cette scène mais sur un mode mineur voire comique avec un ministre interpelé rudement à propos d’une rocambolesque histoire de voiture accidentée dont on aurait fait disparaître les constats. L’affaire en était restée à l’anecdote, mais là nous sommes sur un autre registre.
Le chef de l’état s’accapare le beau rôle en se drapant de magistère moral. Ce faisant il transgresse la constitution qu’il a juré de respecter et de défendre en se mêlant de prérogatives qui ne sont pas les siennes. Les nominations des hauts fonctionnaires de l’état relèvent du chef du gouvernement, c’est dans la constitution.
Maintenant cette brusque colère du chef de l’état contre un homme qu’il a choisi lui-même et qu’il destinait au rôle ingrat de premier ministre est celle d’un homme qui a perdu son pari et qui s’est trompé du tout au tout.
Comment ne pas comprendre que Mechichi cherche à exister et refuse de n’être que le « porteur d’eau » du président de la république. Coincé entre ce dernier et des chefs de partis, rendus encore plus fort par les ratés présidentiels, il cherche le plus naturellement du monde à s’entourer de condisciples, issus de son corps d’origine, l’administration, personnalités, pour son malheur et le nôtre, compromises pour beaucoup avec Ben Ali.
Kaïs Saied prouve, chaque jour un peu plus, qu’il n’est pas un politicien ce qu’il revendique peut-être. Il est sûrement encore moins un politique s’étant pris les pieds avec la nomination de Mechichi et le déclenchement d’une guerre encore larvée avec ce dernier sans parler de l’autre guerre déclarée celle-là avec les partis et le parlement
De quoi désespérer encore plus les tunisiens en ces temps de peste.