N'ayons pas peur des mots : la Tunisie est condamnée à la Démocratie par la logique du régime politique qu'elle s'est heureusement donnée. Duquel, il ne s'agit pas de faire des alliances mais imposer des coalitions, fussent-elles surprenantes.
Une subtilité qui échappe encore à la plupart des acteurs de la nouvelle classe politique baignant dans la même pharmacopée d'illusions et toujours pas guérie de son hémiplégie intellectuelle. Une pratique qui a désormais cours dans des démocraties parlementaires qui sont pourtant passées par la case dictature (Chili, Portugal, Espagne, Pologne, sans parler de l'Allemagne nazie ou de l'Italie fasciste).
Certes, 10 ans après la révolution du 14 janvier 2011, notre démocratie est encore dysfonctionnelle à l'heure où les crises s'emboîtent comme des poupées russes. Dans un contexte de désarroi et de détresse sociale des couches moyennes, où les jeunes, jour après jour, sont nourris au ressentiment face à l'accroissement du chômage.
Mais elle est aussi extraordinairement endurante quand on sait ce qu'elle subit continuellement comme coups de boutoir d'acteurs qui agissent tels des agents pesticides, ne s'épanouissant que dans les conflits et qui sont tous autant qu'ils sont tentés par les charmes de la subversion antidémocratique.
Résultat des courses : nous traversons une transition démocratique prise en tenaille. D'un côté, par des conservateurs sociétaux qui ne rêvent qu'à un retour en arrière identitaire et religieux et de l'autre côté, par des conservateurs sociaux nostalgiques d'un ancien système répressif qui ne conçoivent un régime politique que sous le joug d'une autorité implacable pour tous et la liberté pour certains.
Or, c'est peut-être la chance de cette transition démocratique (qui hélas semble s'éterniser) que de pouvoir se frayer un chemin difficile entre ces deux courants irréductibles. Paradoxalement, c'est là où réside la principale difficulté. Parce qu'en leur milieu, le centre moderniste et progressiste est actuellement trop désuni, trop fragmenté en petites épiceries. A tel point, que celui qui est capable de l'unifier n'est semble-t-il pas encore dans les radars, ou plus inquiétant encore, pas encore né politiquement.
Un centre, qu'il soit de gauche ou de droite, trop élitiste et en même temps complètement à côté de la plaque. N'hésitant pas à envoyer une quinzaine de candidats au 1er tour l'élection présidentielle de 2019 qui se joue au scrutin majoritaire et qui a pour caractéristique principale d'imposer le rassemblement des candidatures et non leur effritement et leur dispersion…