À la lumière de la tentative de coup d'État de la milice privée "Wagner" en Russie, il existe deux options d'interprétation selon moi : soit Prigozhin est une personne déséquilibrée, soit les services de renseignement occidentaux ont réussi la manœuvre qu'ils voulaient commencer depuis le début.
Si Prigozhin a décidé de s’emparer du pouvoir moyennant un coup d'État en utilisant les 25 000 hommes de Wagner - aussi puissamment armés - c'est un acte de folie. Prigozhin, chef de profession, homme d'affaires par vocation, n'a aucune structure politique et presque aucun suivi en dehors des troupes de sa propre armée privée.
Au contraire, Poutine a encore une large panoplie de partisans, non seulement dans les centres du pouvoir, dans les services secrets, dans la structure administrative, dans l'armée, mais aussi au niveau populaire.
De plus, l'armée privée de Prigozhin dépend de l'État russe pour les fournitures militaires, les munitions et les finances. Alors que Prigozhin s'est attaqué de front à Poutine (ce qui s'est produit officiellement hier, avec son refus d'obéir aux ordres du président), Wagner lance un compte à rebours alors que ses propres ressources intérieures commencent à s'épuiser. Le résultat d'un tel scénario peut varier en durée et en bain de sang, mais son sort est scellé et ne peut être conclu qu'avec la tête de Prigozhin sur un plateau.
Cependant, il existe une alternative qui ne devrait pas nécessairement être écartée. À ce stade, Wagner (et son patron) se reposaient du front et la contre-offensive ukrainienne se profilait de plus en plus comme une défaite. Cet événement aurait donné mérite et reconnaissance au ministère de la défense, le ministère même qui a été souvent critiqué jusqu'à présent par le patron de Wagner.
C'était en d'autres termes la dernière fenêtre de tir utile pour Prigozhin pour se croire comme un "homme fort" digne du pouvoir politique, mais c'était aussi peut-être la dernière fenêtre de tir pour sauver l'Ukraine de la défaite.
Dans ces circonstances, il est impossible de penser que les leviers des services secrets étrangers - britanniques par exemple, pas nouveaux à ce genre d’initiatives - ont trouvé un moyen d'accrocher le soi-disant projet de déstabilisation de Prigozhin, en lui apportant un soutien économique et des garanties politiques à l'étranger au cas où les choses tournraient mal.
Dans ce cas, l'action promue par Prigozhin n'aurait plus les caractéristiques d'une simple illusion d'ambition, mais serait un acte calculé et préparé - et en tant que tel beaucoup plus insidieux pour l'État russe.