La Marsa s'est réveillée ce matin, en émoi, avec la triste nouvelle du décès de Sid'Ahmed Mestiri, un de ses plus valeureux fils, une fierté nationale, un héros si discret qui a activement contribué au mouvement de libération nationale, à la construction de la Tunisie post indépendance, à l'instauration du multipartisme.
Allah yerhamou Sid'Ahmed après sa vie bien accomplie. Il a fait partie des grands hommes politiques de la Tunisie, de ses patriotes les plus intègres et les plus intransigeants, de ses grands législateurs (le Code du Statut Personnel dont il présida la rédaction collégiale avec son fidèle collaborateur Sid'Ahmed Ben Arfa), de ses grands Ambassadeurs aussi en Russie et en Algérie, de ceux qui ont eu le courage de s'opposer à la dictature de Bourguiba et d'engager notre pays dans le processus du multipartisme et de la démocratisation.
Aucune compromission, aucune faiblesse devant les menaces, les procès d'intention, la vanité des hautes fonctions. La lucidité d'un visionnaire et la dignité rare de ceux qui refusent de céder aux manipulations politiciennes, aux ors de la République, lorsqu'ils estiment que leurs valeurs sont bafouées.
Sid'Ahmed Mestiri menait une retraite paisible et discrète dans la demeure familiale de Marsa-Ville que nous appelons encore Dar Ella Douja Kassar (une mère iconique qui était la cousine de mon grand-père paternel). Maison aujourd'hui assaillie par un monde fou, venu rendre hommage à celui qui fut un grand serviteur de la Tunisie sans jamais rien lui demander, qui honora toutes ses fonctions, politiques, ministérielles et diplomatiques avec intelligence, intégrité, réserve, classe et humanisme. Des qualités rares lorsque l'on voit les démêlés de la classe politique post révolutionnaire tunisienne.
Qu'il repose en paix. Sincères condoléances à son épouse Mme Souad Chenik, à ses enfants, et particulièrement aux familles Mestiri, Kassar, Chenik et Ben Slama qui accompagnèrent courageusement son parcours militant et dont il fut la fierté.
Aujourd'hui, il serait juste que la Tunisie honore, à la mesure de sa stature politique, ce grand patriote qui refusait modestement la reconnaissance publique. Qui sait quelle aurait été sa place et l'avenir de notre pays si les élections pluralistes de 1981 remportées massivement par son parti le MDS, n'avaient pas été falsifiées au profit du PSD ?