Alger, ce 12 avril. Les Algériens ont vendredit aujourd'hui pour le 8ème vendredi consécutif. Je ne crois pas qu'il existe une force capable de les faire taire demain, après demain, dans 3 mois ou dans six mois avant qu'ils n'aient obtenu ce pourquoi ils sortent dans la rue. Ce ne sont pas des marches ou des manifestations mais une révolution pacifique !
Ce que j'ai vu aujourd'hui à Alger. Début après midi rue Didouche vers place Audin, une colonne de véhicules de la police tente de se frayer un chemin au milieu d'une marée humaine. Un camion de police lance des jets d'eau sur les manifestants sans succès. Les gens crient Silmiya, dansent et chantent. Deux ou trois énergumènes jettent des bouteilles d'eau, un bout de planche en bois sur le camion mais vite rappelés à l'ordre par la foule. Le camion recule. Les gens chantent, des femmes lancent des youyous.
Les flics reculent sous les applaudissements et même les embrassades des manifestants. J'ai vu des policiers pleurer, des gens leur faire une haie d'honneur. Pas une seule agression.
Les flics auraient pu être violentés. Non, rien. Aucun n'a été touché dans son intégrité physique ou sa dignité. Un type lance une obscénité, très vite recadrer. Sous la pression d'une foule pacifique et joyeuse, le convoi des forces anti-émeute repart.
C'est ce peuple pacifique et joyeux qui manifeste et fait sa révolution. Entre 16h et 18h3O, j'étais au Boulevard Mohamed V. Des voyous, des « baltagyias » qui n'ont rien à voir avec les manifestants attaquent le cordon de sécurité qui riposte par des tirs lacrymogènes.
J'ai vu des « baltaguias » hyper excités, d'autres qui voulaient cogner des flics. J'ai assisté à des scènes où des CRS tentent de raisonner les jeunes, les calmer, les supplier de rejoindre la marche pacifique rue Didouche.
J'ai vu des policiers pester contre des collègues policiers qui tirent des bombes lacrymogènes. J'ai vu un flic raisonner des jeunes très tendus alors qu'il aurait pu être lynché. Le calme revenu vers 18h30, j'ai vu alors des gens du quartier nettoyer la rue, ramasser des cailloux, des gravats sur la chaussé, remplir les poubelles, balayer les trottoirs, tout cela après que les voyous soient partis.
Les voyous et les casseurs ne viennent pas manifester. Ils viennent pour tenter de casser cette révolution Silmiya. Entre les manifestants de la rue Didouche et les voyous du Boulevard Mohamed V, il y a à peine 300 mètres de distance. Mais il y a tout un monde qui sépare les uns des autres.