Car ce n’est pas d’aujourd’hui que la Belgique est montrée du doigt par son voisin français, qui partage un passé colonial qui explique bien des choses. On parle souvent du pourcentage élevé de personnes partis combattre en Syrie par rapport à la population du pays, oubliant que la France est tout de même largement en tête de ce contingent en Europe. Mais on parle peu de la Suède, deuxième dans ce classement par habitant, qui ne veut pas forcément dire grand-chose. La Suède reste l’exemple encore du bien vivre ensemble, pour nos médias français. Les statistiques sont de toute façon assez floues puisque nos douanes ont largement fermé les yeux lorsque ces combattants partaient avant 2014 pour la Syrie. Et comme l’EI ne tient pas de base de données en open data …
Mais la condescendance dont ont fait preuve médias français et politiques de l’hexagone ne s’arrête pas à ces statistiques. On a entendu des critiques sur le traitement des victimes à l’Aéroport en oubliant la désorganisation des premières heures de nos institutions en Novembre. Une désorganisation somme toute naturelle car entre l’entrainement et la réalité, il y a toujours une phase de choc qui reste dans l’imprévisible.
On a beaucoup parlé du manque de coordination entre les polices, les douanes. Même la Turquie a rajouté son grain de sel, comme pour rappeler qu’elle n’est pas une carpette sous laquelle on mettra toute la misère du monde dont l’Europe ne veut pas. On remarquera juste que les ministres belges ont eu le courage de proposer leur démission, alors qu’on attend celle de Cazeneuve et les excuses de ses prédécesseurs pour toutes les fautes identiques commises en France. Et ne parlons pas de la totale désorganisation de l’administration française pour traiter les demandes des ressortissants étrangers, comme un simple renouvellement de carte de séjour. (Source Cimade)
En réalité, il faut cesser de se croire infaillible, protégé à 100%. Les failles sont innombrables pour qui veut faire un attentat et ne peuvent simplement être comblées. On parle du PNR (Passenger Name Record), comme solution proposée par la France et refusée par ses voisins. C’est en fait une vaste idiotie qui noiera les informations pertinentes dans la masse, comme le fait déjà l’espionnage généralisé. Déjà parce que ces bases de données de passagers existent mais ne sont pas reliées. Donc on peut les interroger à posteriori.
Ce qui n’existe pas, c’est une liste partagée des personnes suspectées de terrorisme et qui serait un minimum pour éviter qu’un pays ne devienne temporairement une base arrière. Mais il faudrait s’entendre sur la notion de terrorisme puisqu’on arrête même des gens qui distribuent des tracts antinucléaires, en France. La France veut faire oublier ses manques en matière de partage inter-services hexagonaux (vu par exemple dans les affaires de pédophilies) en accusant ses voisins de freiner une solution absurde.
Et puis il y a encore ce retour au vocabulaire guerrier de la part de Manuel Valls, ce triomphalisme de Hollande à la moindre arrestation d’une personne qui reste présumée innocente jusqu’à son procès, rappelons-le. Aucun ne cherche même à traiter les racines d’un mal qui va bien au-delà de l’islamisme. Entre 2000 et 2013, il faut rappeler que 5% des attaques terroristes répertoriées l’ont été sous le prétexte de l’islamisme radical (Source : Global Terrorism Database, Université du Maryland). Toutefois, ces 5% représentent 60% des victimes, 20% étant imputables aux mouvements d’extrême droite. Si on a arrêté en Belgique des individus dont les parents sont d’origine marocaine, par exemple, il y a tant d’autres origines, du français que certains disent « de souche » au portugais, italien, parmi le contingent de terroristes de l’EI (et non djihadistes qui est un dévoiement d’un terme)….
Mais le premier ministre français considère que chercher les origines d’un mal c’est l’excuser. C’est vrai que les excuses et lui, cela fait deux, … Alors on se contente de rajouter des policiers et des soldats qui sont déjà épuisés par vigipirate, mesure inutile et ridicule (voir à ce sujet l’excellent reportage de Polka Magazine). L’épuisement conduit souvent à la violence et on l’a vu encore dans les manifestations contre la loi El Khomri sur le travail. Le ministre Macron a fait preuve aussi d’arrogance sur ce sujet, précisant que les lycéens ne connaissaient pas la réalité du monde. La connait-il mieux dans sa tour d’ivoire si éloignée qu’il est des « sans-dents »?
Le bilan est que l’on croit avoir tué une filière terroriste mais qu’en réalité on ne sait pas grand-chose sur d’autres foyers potentiels, même ailleurs en Europe. Car demain, ce sera peut-être Berlin, Londres, Amsterdam ou Stockholm qui seront visés, sans oublier les pays plus lointains qui payent un plus lourd tribut. Les bombardements occidentaux continuent en Syrie et alimentent ainsi les arguments des endoctrineurs de l’EI.
La situation sociale de nos pays européens fait de même, mais ça, tout le monde s’en fiche puisqu’on continue d’alimenter les inégalités et l’ostracisme, tant ethnique, que religieux et social. L’Allemagne a compris, un temps, qu’il fallait cesser de faire cavalier seul (on en reparle dans un prochain article), mais c’est au tour de la France de vouloir jouer au petit chef, comme au temps de …. Nicolas Sarkozy. Il y a pourtant bien plus à faire dans le giron français avant d’aller donner des leçons.