Le jury du Nobel consacre la sous-démocratie tunisienne

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Le prix Nobel a récompensé les efforts du Quartet pour réaliser le processus démocratique. Tiens, tiens ! Et nous qui pensions, naïvement, que le respect du processus électoral était fondamental dans la démocratie !

Eh bien non, ces éminents spécialistes de la démocratie qui siègent à Oslo ont décidé que non, que la démocratie n’est pas le respect des élections, c’est-à-dire de la volonté du peuple à un moment donné, mais de la capacité d’éviter une guerre civile. Soit. Mais qui donc appelait à l’intervention de l’armée pour en finir avec l’assemblée constituante, issue, selon tous les observateurs, d’élections à peu près valables ? Qui menaçait de transférer en Tunisie les méthodes énergiques de « rétablissement de l’ordre » en œuvre dans l’Egypte dominée par Sissi et son armée ? L’acceptation de l’arbitrage du Quartet n’est-elle pas une capitulation des islamistes devant les menaces dirigées contre eux ? Si c’est cela la démocratie que veut récompenser le jury Nobel, on se demande ce qu’apprennent encore les étudiants en sciences politiques en Europe : peut-être que les méthodes fascistes sont les plus aptes à instaurer la démocratie ?

Le quartet, invention des ennemis de la constituante, a substitué aux discussions entre élus du peuple dans le cadre légal, une discussion entre différents représentants de partis politiques qui étaient plus ou moins représentés dans la constituante, et parfois n’avaient aucun élu : est-ce là le modèle de processus démocratique que le Nobel voudrait voir régner sur la planète ? Du reste, aux élections présidentielles suivantes, la démocratie a fait un véritable bond, montrant l’adhésion populaire au processus démocratique du quartet : l’abstention a dépassé les 55%.

Il est clair que cette nomination n’est pas réjouissante pour la Tunisie, qui semble ainsi n’être pas capable d’une vraie démocratie : on récompense ceux qui ont accepté de donner un semblant de légitimité consensuelle à ce qui était un coup de force pour changer la donne politique du pays. Qu’on ait fait accepter les résultats des négociations parles élus ne prouve pas grand-chose : ou bien, ils ont accepté de se soumettre par crainte, ou bien ils auraient pu être convaincus si les débats s’étaient normalement tenus au sein de cette instance, exemple de démocratie pour certains jusqu’à ce qu'ils appellent à son renversement par la force.

Ainsi, nous, peuples arriérés, n’avons droit qu’à une sous-démocratie : quoi qu’ils disent, ils ne récompensent pas les artisans d’un quelconque processus démocratique, ils récompensent ceux qui ont su faire plier les islamistes par la seule menace. Mais peut-être auraient-ils été plus inspirés de récompenser Sissi dont les méthodes ont constitué des menaces suffisantes.

Estimons-nous heureux, nous disent ces gens si puissants, que les islamistes aient accepté de quitter pacifiquement le pouvoir. Et tant pis si le peuple ne voit pas d’améliorations de sa situation, tant pis si on lui a volé sa révolution et si, maintenant « calmés », les islamistes se partagent avec leurs ennemis d’hier les dépouilles d’un pays que tous les politiques continuent de ruiner.

Mais pendant combien de temps pourront-ils, avec ou sans prix Nobel, éviter de rendre de comptes ?

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