Un artiste doit avoir plusieurs cordes à son arc. Sa vie est remplie d’expériences et d’émotions intenses. Il se doit de tâter à plusieurs domaines, de l’écriture à la peinture en passant par l’audiovisuel et l’essai cinématographique..Etre derrière et devant la caméra est un acte de sublimation, avouait François Truffaut qui en tant que réalisateur, a été aussi l’interprète de ses propres films.
Etudiant, comme tous mes collègues dans les années quatre-vingt, j’ai joué dans des célèbres pièces de théâtre classiques-Antigone, Phèdre, Andromaque…-montées par la troupe de théâtre officielle de la Cité Universitaire internationale de Paris. Ainsi, je suis monté sur les planches, c’était riche, beau, captivant…Après, je n’ai plus jamais fait de théâtre, happé par les tracas de la vie quotidienne et par la question de la littérature.
Une fois de retour à Tunis, j’ai fait un stage d’assistant montage dans le superbe film de Nouri Bouzid : Les Sabots en Or, en 1989, tournée dans sa grande majorité dans la vieille Médina de Tunis et aussi dans un abattoir de chevaux. Vingt-six ans plus tard, je retrouve la médina, ses ruelles indémodables et ses restaurants et lieux inclassables, le haras des chevaux d’El Batan, des sites historiques de prédilection qui font rayonner l’image historique et cosmopolite de la Tunisie à travers les destinations du monde, tels que la Rue de Souk El Kachechine dont le barbier-hammam date de 475 ans et le fameux restaurant el Abed construit depuis 543 ans merveilleusement fonctionnel, les Maisons et Palais majestueux de Tunis, tels que le Musée du Bardo, du palais du Baron d’Erlanger à Sidi-Bou-Saïd, la Maison de la Rachidia avec son patio en faïence bleue à la rue Hammouda Pacha,Le Palais-musée du kobbat Ennhass qu’a construit et édifié Moulay Rachid Bey en 1767, les thermes d’Antonin de Carthage ainsi que les écuries d’entretien et courses de chevaux à El Batan, bourgade à proximité de la capitale…
Là, je suis derrière la caméra, je joue le rôle de monseigneur Thomas Shaw, ecclésiastique et voyageur britannique ; à qui à ce qu’il paraît je ressemble comme deux gouttes d’eau. L’allure, le visage rondouillet, le regard pénétrant, je porte aussi sa perruque noire du 18éme siècle (1732), régence d’Alger et séjour scrutateur d’une année en Tunisie, dans ses provinces et moindres recoins..Je porte allègrement sa cape noire à jabots, en dentelles et bavière blanches , ses chaussures noires à boucle, son collant blanc et surtout le poids de ce personnage haut en couleurs, homme de lettres et voyageur invétéré dans les pays du Levant et en Afrique du Nord, maniant parfaitement l’arabe et l’hébreu, qui parcourt à pied plusieurs régions de la Régence , particulièrement soucieux des antiquités romaines et féru de plantes sauvages , du plat de « Lablabi » et d’élevage de chevaux de race.
Son œuvre, vieille d’un siècle, a eu un regain de faveur lors de la conquête d’Alger par les Français en 1830.Le reste est à découvrir quand vous verrez ce documentaire fiction projeté à l’écran, magistralement tourné par nos amis cinéastes et caméraman, qui ont misé sur la qualité de l’image et du son, l’esthétique et le prestige des lieux authentiques valorisant notre chère Tunisie…
Honni soit qui marche à l’aveuglette, qui résonne au son d’un criquet !Oui, je suis remonté sur les planches, mais cette fois-ci sur le plateau du cinéma, je suis monté sur un cheval blanc et j’ai admiré les merveilleux instruments du conservatoire de musique traditionnelle et d’art de Sidi-Bou…
La beauté s’infiltre partout dans ce court métrage, de la peau et tenues des acteurs jusqu’au prestige des lieux féeriques !
Elle fuse de partout, insolente et agressive…Cours après moi que je t’attrape, c’était Depardieu chassant un lièvre, nous, nous attelons à rehausser l’image de Tunis, longuement visitée et admirée, par les intellectuels, artistes et ecclésiastes du monde….