Nos proverbes sont racistes…
Nos plaisanteries sont racistes…
Nos jeux de mots sont racistes…
Notre inconscient en est imbibé, bassiné ... Détrempé, de propos racistes et vulgaires…
Notre conscience, elle, est avachie…
Ça prie, ça jeûne, ou ça braille liberté, dignité et ça continue d’être crade…
L'agression contre la jeune étudiante subsaharienne hier n'est que le reflet de ce que nous sommes, sans jamais avoir le cran de l’avouer, NOUS SOMMES DÉGUEULASSES et nous ne faisons rien pour nous en sortir…
Je n'ai pas de formation en sociologie, aucune non plus en Histoire socioculturelle d'un pays, mes acquis dans ces domaines se limitent à l'étude d'un cadre sociopolitique d'une œuvre ou d'un courant littéraire. Je n'ai donc pas la prétention d’empiéter sur les plates-bandes des connaisseurs.
Néanmoins, je suis née dans ce pays, j'y vis, j'y travaille et…Je vois, j’écoute, je constate.
J'y travaille et durant toutes ces années au service de l’enseignement, je n'ai jamais eu de collègue Noir€, à part une grande amie qui a choisi d'effectuer un travail administratif, et je n'ai jamais osé lui demander ses véritables motivations…Peut-être parce que je redoutais qu'elle ne confirme mes soupçons…
Je n'ai jamais eu de supérieur hiérarchique, administratif ou pédagogique, Noir…Allez savoir pour quelles obscures raisons, ils n'accèdent pas à ces postes ou à d'autres tout aussi " honorifiques "…
Par contre, j'ai eu des élèves Noirs…Et sans vouloir être idiotement modeste, j'ai tout fait pour sévir, (et Dieu sait que je suis " cool " comme prof selon mes potaches), d'une manière implacable et intransigeante contre toute manifestation, aussi anodine soit-elle, dénotant d'un sentiment ou d'une pensée ou d'une expression douteuse les concernant. J'ai systématiquement arrêté le cours pour faire une mise au point.
Ces élèves m'ont beaucoup appris , je me suis souviens surtout d'une certaine très jolie Meriem , qui était en terminale et qui avait pris la parole un jour , pendant plus d'une demi-heure dans une langue impeccable , pour rabaisser le caquet à tout ce beau monde en classe , pour raconter son quotidien , et le quotidien de tous ces jeunes qui font semblant de jouer le jeu de la plaisanterie , mais qui ont ras le pif de cette société de moules ramollies.
J'écoute et nous écoutons TOUS sans broncher les plaisanteries, les fumisteries d'un goût plus que véreux qui émaillent notre quotidien et qu'on met hypocritement sur le compte du caractère débonnaire du tunisien.
J'écoute toutes ces conneries du genre : " je ne suis pas raciste mais…(le truc débile par définition : l'Oscar du crétinisme patenté)…ce n’est pas méchant, ils sont comme nous (c’est qui "nous " justement ?)…tu sèmes la zizanie, y a pas de racisme chez nous (le déni fi abha tajeliyatou : notre sport de prédilection)…..ti yezzini 3aychek tu marierais ta fille à un Noir (mais on ne marie plus les filles, connard ! Où vis-tu ? )….Ils (les étudiants africains, parce que comme vous ne le savez pas nous sommes situés en Australie en haut légèrement au milieu), sont bruyants, sales, et boivent de l'alcool…..!!! (Parce que nous, les tunisiens, nous sommes un modèle de civisme, d'hygiène et de piété …!!!...non, mais sans blague !on s'est vu quand on se marie ou quand on monte dans les transports communs…Ça sent la rose et le réséda peut être..!!..).
J'ai toujours rétorqué…J'ai toujours essayé de ne jamais, au grand jamais, entrer dans ce silence crasseux de la complicité et du laisser-faire. Et c'est ce que nous sommes tous appelés à faire afin d’être conséquents avec nous-mêmes et avec les valeurs que nous défendons.
Je constate enfin , toutes les injustices sociales , politiques , culturelles que subissent aussi bien les tunisiens Noirs que les étudiants venus de pays africains et contre lesquelles aucune loi n'est clairement définie …Je constate que notre violence , notre agressivité notre bêtise amplifient chaque jour davantage , que nos stéréotypes et nos préjugés nous enferment et nous isolent et que le sentiment religieux ou le discours humaniste des uns et des autres n'est qu'un slogan , un cache-misère derrière lequel nous nous barricadons comme des pisse-vinaigre.