Destinées humaines et petits calculs politicards

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La nouvelle n’a, certes, pas fait la une des journaux, ni provoqué d’émoi particuliers chez le citoyen tunisien moyen, ni même suscité quelque débat que ce soit, et pourtant, mise en rapport avec le dernier drame de Kerkennah, où près de 150 jeunes en quête de lendemains plus enchanteurs outre méditerranée ont été rattrapés par la fatalité de leur destin, elle aurait dû interpeller l’opinion sinon plus du moins autant que la lamentable défaite concédée par les oisillons de Carthage.

Petit rappel des faits.

S’escrimant, tel un prestidigitateur de bas étage, à métamorphoser un pitoyable « come-back » en un triomphe à la romaine du bas-empire, le sieur Hatem Ben Salem, Ministre de l’Education de son état, annonça à la cantonade, tel un paon paradant devant ses suppliciées conquêtes, l’exclusion définitive de tous les établissements scolaires publics de Tunisie de 535 des élèves candidats au baccalauréat.

Excusez du peu ! Cette sentence sera, ce faisant, accompagnée d’une peine de sureté, privant les dits hors-la-loi, convaincus de tentative de fraude à l’examen du baccalauréat, de leur droit à la candidature du sacro-saint diplôme ouvrant la voie à ce qui, jadis, fut un ascenseur social, à savoir les études supérieures… et ce, pendant cinq longues années! Autant dire que toute perspective de promotion sociale, diplômes à l’appui du moins, était désormais nulle et non avenue pour ces 535 potentiels cadres du pays.

Croyant, à tort, affermir l’autorité de l’Etat, ou, mieux encore, assoir son prestige, la forme plus que le fond même de cette fanfaronnade ministérielle ne laisse de choquer. Ce triste sire n’a pas encore réalisé que nous vivons, dans ce beau pays une réelle fracture entre l’Etat et la jeunesse, tous bords confondus ? Sans qu’il ait besoin d’en rajouter avec sa novembriste dégaine d’implacable légaliste !

Les mères éplorées n’ont-elles pas suffisamment sacrifié à la méditerranée, ou autre cohorte daechienne, pour qu’elles aient encore à pleurer 535 nouvelles victimes ?

Avec ses 110000 « déchets », excusez la rudesse de l’expression, -entendez exclus du système éducatif public- annuels, n’en avons pas nous assez, pour y adjoindre plus de cinq cents supplémentaires ?

Au reste, n’aurions-nous rien à redire de la gestion calamiteuse de cette rachitique « année » scolaire pour que l’on se permette d’être aussi intraitable s’agissant de la discipline, du respect des lois, et de l’éthique, lorsqu’on a gaspillé toute une année à jouer au plus fin avec les syndicats des enseignants?

L’année scolaire a-t-elle été à ce point exemplaire que Monsieur le Ministre puisse faire montre de pareille implacabilité ? N’a-t-il pas été le premier à fausser le jeu par ce fastidieux, et non moins minable, chassé-croisé avec le « ché » d’opérette, galvanisé par son quart d’heure de gloire, le pseudo syndicaliste, et néanmoins bon père de famille à ses dires, Lassâad Yakoubi ?

Plus de cinq cents de nos enfants, fautifs certes, voués à un avenir plus qu’incertain, sacrifiés, en pure perte, à l’autel du prestige de l’Etat, à la nostalgie d’un ministre d’un autre âge… âge qu’une jeunesse, un peu plus âgée, certes, que celle, aujourd’hui livrée en pâture, à la perdition, avait définitivement clos… le croyait-elle, du moins…

Ultime question : quelle serait le plus préjudiciable à l’image de marque de l’Etat : Cette mesquine lutte pour un pouvoir aussi incertain que chimérique à l’horizon 2020 ou bien une futile bêtise commise par des gosses de 20 printemps… Qui d’ici vingt prochaines années en souriront à l’unisson… n’eût été la bêtise… que dis-je l’infamie ministérielle ?

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