Les légendes ne meurent jamais: Mohamed Ali en était une.

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La boxe était devenue ce qu'elle est à savoir le noble art grâce à lui.

Mohamed Ali swinguait sur le ring, virevoltant, espiègle, papillonnant autour d’adversaires ahuris par sa classe insolente, son regard défiant les plus impétueux d’entre-eux… on n'aurait jamais vu un poids lourd aussi léger que lui, ça dansait avec la grâce d'un Noureev, donnant le tournis à ses pauvres rivaux, souvent humiliés par son côté provocateur et arrogant.

Virtuose, il l’était, boxeur et poète, tribun et allumeur, hâbleur et incontestablement d’un charisme détonant !

Ses coups de poing, jabs ou uppercuts, étaient des coups de pinceau, assénés avec intelligence, finesse et adresse.

Mohamed Ali c'est aussi l'homme qui perdit son titre et fut incarcéré parce qu'il avait dit non à la guerre, non au Vietnam, alors qu'il était au summum de sa carrière.

Mais la reconquête ne fut que plus belle, en terre africaine, terre de ses aïeux, à Kinshasa, en l'an de grâce 1974: Foreman, la bête humaine, démoli en deux secondes par un enchaînement de coups magistral alors que « the greatest » durant 7 rounds avait été acculé à se défendre et à résister, il a suffi que Foreman baisse un instant la garde pour que la belle mécanique le broie.

Il était cinq heures du matin, les cafés de Tunis et alentours bondés de monde, tressaillirent de joie, ce fut presque un séisme.

Adieu l'artiste, on t'aimait bien.

« Le plus grand », comme Mohamed Ali aimait se décrire lui-même, est mort, vendredi 3 juin à Phoenix (Arizona), d’une insuffisance respiratoire, à l’âge de 74 ans.

Après trente-deux années, la maladie de Parkinson a fini par terrasser l’une des dernières icônes planétaires du sport. Il restera, pour l’éternité, une belle et grande gueule qui n’hésitait pas à martyriser – avec sa verve ou ses poings – ses adversaires qui lui avaient manqué de respect.

Mohamed Ali est né Cassius Clay à Louisville, dans le Kentucky, le 17 janvier 1942 dans un milieu pauvre, jure-t-il, même si sa propre famille a toujours préféré le terme modeste. Son père, Cassius Marcellus Clay Senior, peint des affiches publicitaires et Jésus, qu’il aimait dessiner « blancs aux yeux bleus ». Sa mère, Odessa, femme de ménage chez les riches blancs, élève ses deux garçons.

Le « boxeur poète »

Après une carrière amatrice vertigineuse – médaille d’or olympique des mi-lourds (75-81 kg) aux Jeux de Rome en 1960, 108 combats, 100 victoires –, Cassius Clay rencontre, pour son premier championnat du monde, prévu à Miami, le 25 février 1964, le «vilain ours » Sonny Liston. A 32 ans, celui-ci est donné favori à huit contre un. Cassius Clay est déjà surnommé le « boxeur poète », lui se dit déjà « le plus beau, le plus grand ». Et à la surprise générale, c’est le jeune apollon de 22 ans qui pousse son aîné, blessé à l’épaule gauche, à l’abandon avant la reprise du 7e round. Durant le combat, Sonny Liston avait tenté d’aveugler le rejeton pour éviter de finir humilié dans les cordes. Il touchera 1,15 million de dollars et Cassius Clay 650 000 dollars pour son premier sacre.

Mais pour la presse, ce combat est une « combine ». Cette année-là, Cassius Clay n’existe plus. Il exige qu’on l’appelle Cassius X, renonçant ainsi à son nom d’esclave légué par d’anciens propriétaires blancs. Il fréquente un certain Malcom X, et la secte politico-religieuse Nation of Islam, dirigée par Elijah Muhammad. Cassius X devient Mohamed Ali et exige qu’on l’interpelle uniquement par son nom musulman.

Le refus d’aller au Vietnam

La revanche Liston-Ali se profile. Et le 25 mai 1965, à Lewiston, dès le premier round, Sonny Liston tombe. « Debout et bas-toi, enfoiré », lance Mohamed Ali. C’est la victoire la plus rapide de l’histoire des championnats du monde des poids lourds. Le coup de poing fatal – surnommé « le coup de poing fantôme » – est si furtif que personne ne semble l’avoir vu dans le public. Encore une fois, ce combat est controversé…

Mohamed Ali défendra, avec succès, neuf fois son titre. Mais la guerre du Vietnam le rattrape en 1966. Il refuse d’aller au front car sa religion le lui interdit. Pour lui, « les Vietcongs sont des Asiatiques noirs », et il n’a pas à « combattre des Noirs ». Il est condamné le 21 juin 1967 à cinq ans de prison et 10 000 dollars d’amende. On lui retire son titre et sa licence de boxe.

Mais il ne baisse pas la garde. En 1970, on lui réattribue sa licence, un tribunal ayant reconnu qu’une condamnation pour insoumission ne justifiait pas qu’on lui retire son moyen d’existence. Le ring retrouve son maître et Mohamed Ali enchaîne de nouveau les combats et les victoires. Une seule chose l’obsède : la reconquête du titre. Le 8 mars 1971, au Madison Square Garden de New York, deux boxeurs invaincus vont s’affronter dans le « combat du siècle ». Mohamed Ali contre le champion du monde en titre, Joe Frazier.

« The Champ » va perdre ce duel aux points. Il faut repartir de zéro. Un long chemin pour devenir le challenger numéro un. L’ancien champion a vieilli et est moins agile. En 1973, face à Ken Norton, il perd une deuxième fois et quitte le ring avec une mâchoire fracturée…

Puis, ce fut le comeback, Kinshasa, Foreman, le triomphe sur le sol africain, un pied-de-nez à tous ceux qui tentèrent, vainement, d’enterrer la légende !



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