La semaine dernière, une violente et grave crise diplomatique a secoué la région du golfe, jusque là connue pour sa « richesse » et sa « stabilité ». En 1981, suite à la révolution iranienne, l'Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unies, le Koweït, le Qatar, le Bahreïn et Oman ont fondé le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et un projet d'union entre les six états a été déposé par les Saoudiens ces dernières années.
Dans les années 90, le Qatar est devenu un acteur socio-économique très influent dont le peuple commence à prendre connaissance des enjeux stratégique, notamment avec l'arrivée de la chaine Aljazeera. Cette dernière séduit les peuples et agace les dirigeants et les dictateurs qui se soucient peu des questions liées à la démocratie, la justice sociale et la transparence.
Les problèmes au sein du CCG ont commencé avec le déclenchement du printemps arabe en Tunisie, notamment avec la couverture médiatique de la chaine Aljazeera des révolutions populaires en Egypte, Lybie, au Yémen, Bahreïn, en Syrie etc...
Lors des élections postrévolutionnaires en Tunisie, au Maroc, en Lybie et en Egypte, les électeurs ont été séduits par le discours des « islamistes », ce qui peut compromettre le maintien de certains régimes dans les pays du golfe. Les régimes saoudiens, Emirati et Bahreïni sont parvenus à étouffer rapidement les manifestations et à répondre à certaines revendications de la rue de la manière qui leur convenait.
Le dictateur tunisien Ben Ali a notamment trouvé refuge en Arabie Saoudite et son beau fils Sakr Matri au Qatar (avant de le quitter pour les Seychelles en 2013) alors que l'égyptien Ahmed Chafik, le candidat aux élections présidentielles ayant perdu contre Mohamed Moursi , le dirigent libyen Mahmoud Jebril , le fils du président déchu au Yémen Ahmed Abdallah Salah, certains membres de la famille du Syrien Bashar El Asad, le palestinien Mohamed Dahlen, chassé de la bande de Gaza, ont tous trouvé refuge aux Émirats Arabes Unies .
Ces dernières années, les pays du CCG ont adopté des positions et des stratégies différentes et des fois conflictuelles. Il suffit de mentionner la vision par rapport au processus démocratique en Tunisie, l’agression israélienne contre Gaza en 2012 et en 2014, le coup d'état en Egypte en 2013, le conflit en Lybie, la guerre en Syrie, le coup d'Etat militaire qui avait échoué contre le président Erdogan l'année dernière, l'accord sur le nucléaire iranien ou même les élections présidentielles aux Etats-Unis pour se rendre compte que les enjeux ne sont plus les mêmes.
Certains discours de l’ancien président des Etats-Unis Barack Obama et de ces collaborateurs sur la démocratie et l'ouverture ont été perçus comme un soutien aux « islamistes » ainsi qu’un danger majeur par les régimes en place.
Au cours de la deuxième moitié du XXème, les États-Unis ont supplanté la Grande-Bretagne dans son rôle de défenseur d'Israël et ont ainsi pris le contrôle des hydrocarbures dans la région du Moyen-Orient, ce qui cause d’énormes problèmes de stabilité en Irak, en Syrie et en Afghanistan.
Avec l'arrivée de l’homme d'affaires Donald Trump au pouvoir, certains ont considéré que le moment était venu pour se débarrasser définitivement des maux du printemps arabe, de la démocratie et des libertés. Ce que nous observons aujourd'hui est une vague de contre-révolution motivée par des désirs de haine et de vengeance.
Ce courant a trouvé un soutien de la part de Donald Trump ainsi que des extrémistes de la droite conservatrice aux Etats-Unis. Ces derniers n’ont aucun scrupule lorsqu’il s’agit de placer des peuples ainsi que des Etats «sous tutelle» ou sans souveraineté, car ce qui compte à leurs yeux est le soutien inconditionnel à Israël et leurs intérêts économiques.
Trump avait déclaré ainsi dans une vidéo diffusée dans les réseaux sociaux qu’il désirerait obtenir 20 à 30% des richesses des pays du golfe et cela avant de devenir président des USA.
Avec sa politique dévastatrice dans une région complexe, Mr Trump ne va pas «chasser» les extrémistes et les « terroristes» et «isoler» l'Iran comme il le souhaitait. Il va au contraire donner plus de temps et de moyens aux nids du terrorisme et va renforcer la présence Iranienne dans la région.
Si le conflit n'est pas résolu rapidement, l'Iran, la Turquie et le Pakistan vont de ce fait avoir une présence beaucoup plus visible. Le Koweït et Oman seront ainsi obligés de choisir leur camp.
La Suisse est le pays le mieux placé pour comprendre les enjeux et ainsi jouer un rôle médiateur entre l'Arabie saoudite et le Qatar afin de résoudre ce conflit. Dans le cas contraire, cela pourrait avoir un impact énorme sur l'économie, le sport ainsi que la stabilité et la sécurité dans le monde.