Des élections approximatives, le rejet du modèle occidental et un Parlement très masculin…

Photo

Le retour du refoulé et la belle étrangère

Dans aucune démocratie occidentale, un tel processus électoral n’aurait été validé. Chez nous, l’ISIE ferme les yeux sur l’interminable liste de dépassements et d’irrégularités signalés par les observateurs de ATIDE, Mouraqiboun, IWATCH, de l’Union européenne, des partis politiques, de l’UGTT. Mais l’ISIE passe l’éponge du moment que ces dérapages ne confinent pas au crime électoral, sans que personne ne sache où et selon quels critères commence ce « crime ».

Les dérives se situent bien en amont de la campagne électorale. La pire concerne la publicité autour des listes en lice, à la télévision ou à la radio, l’index étant pointé surtout vers les chaînes Nessma, El Zitouna et El Quran, mais les autres écrans ou ondes faisant le choix des candidats à promouvoir ne sont pas en reste.

Si je peux me permettre cette incorrection, le « plus pire » est relatif à l’argent politique circulant depuis des mois sous la couverture de l’associatif humanitaire. Sur ce chapitre, l’UGTT accuse particulièrement Ennahdha, mais les deux formations populistes Qalb Tounes et Aich Tounsi battent aussi des records d’investissement financier de ce type. Quant aux actions de lobbying, elles suscitent, surtout venant de Nabil Karoui, suffisamment de contestations et de recours en justice pour que je ne m’étende pas sur ce sujet.

Au final, un Parlement est élu, où malgré la reconduction de quelques dizaines d’anciens députés, un nouveau profil de représentants prend place. Certains croyaient y avoir échappé au cours de la législature de la Constituante, où la bataille du mixage de l’ancien et du moderne (pour parler rapidement) a fait rage jusqu’à donner une Constitution équilibrée ou bancale, comme chacun veut.

Puis le dernier des Mohicans, Béji Caïd Essebsi a, de toute sa stature, bloqué le retour du refoulé en signant un pacte avec Ennahdha, une forme de paix des braves, une pacification de l’histoire dont malheureusement il perdit le contrôle par suite d’un délire de prétentions dynastiques.

Nous revoilà aujourd’hui à la case départ de 2011 avec une représentation qui, pour l’essentiel, sabre le modèle et les valeurs de l’État tunisien de l’indépendance. Dans ce basculement du pays pour ainsi dire, du Nord ou Ouest de la Méditerranée vers son plus profond Sud-Est, en deçà du 35ème parallèle, s’achève pratiquement l’histoire d’une Tunisie dont les chefs avaient choisi jusqu’ici de s’arrimer plutôt au Nord, à l’Occident et particulièrement à la France : malgré une résistance nationale contre la colonisation française, les vainqueurs de l’indépendance, excluant leurs challengers, sont restés dans les entrailles de la métropole dont ils se sont nourris, des valeurs et de la langue, du modèle institutionnel, éducatif et culturel, du système de développement.

À peu de chose près - car il s’agit d’une analyse à grand trait - terminus pour ce monde-là qui a assuré la progression du pays en laissant sur les marges ceux qui n’y adhéraient pas ou qui ne leur ressemblaient pas.

Fin de l’histoire pour les enfants de Bourguiba, particulièrement pour ses filles et petites-filles dont le succès, les privilèges, l’assurance et parfois l’arrogance tenaient à bonne distance les autres si peu francophones, si peu rationnels, et qui dans leur us et coutumes et jusque dans leur look vestimentaire, leurs pratiques culturelles, n’étaient pas comme ces héritiers d’une indépendance confisquée.

La révolution poussée jusqu'à un extrémisme presque fascisant, commanderait donc de tourner le dos à ce monde qualifié aujourd’hui d’ancien et d’en rejeter surtout les acquis égalitaires en leurs substituent la notion de justice, d’équité ou de complémentarité établie par le Coran.

Est-ce pour cela qu’il y a si peu de femmes dans le nouveau Parlement ? La plupart d’entre elles seront voilées, ce qui est de leur choix légitime mais bien que ces femmes soient très revendicatives sur les questions d’accès aux charges publiques et de droit des femmes au travail, elles n’en demeurent pas moins dans une soumission à la domination masculine et au patriarcat.

Cela se voit dans la résistance à l’égalité successorale mais faut-il craindre que le droit à l’avortement ne vienne à être remis en question, dans une restriction encore plus rigoriste du droit à disposer de son corps ?

Dans un tel Parlement, que viendra faire la charmante Olfa Terras tout à fait antinomique par son histoire personnelle, son ascendance liée à la présence française à Bizerte, son mariage, sa manière d’être, sans parler d’ambitions appuyées sur une fortune venue d’ailleurs qui ont emporté Aich Tounsi.

J’ai dit beaucoup de mal de cette formation populiste et de sa démarche, mais j’avoue que je regarderai à l’avenir l’élégance d’Olfa Terras et ses yeux d’outre-mer, comme ceux de l’étrangère pourtant des nôtres, une éphémère fleur de notre passion.

Poster commentaire - أضف تعليقا

أي تعليق مسيء خارجا عن حدود الأخلاق ولا علاقة له بالمقال سيتم حذفه
Tout commentaire injurieux et sans rapport avec l'article sera supprimé.

Commentaires - تعليقات
Pas de commentaires - لا توجد تعليقات