Mouloud Feraoun ou Le Prix d’une Vie

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On ne peut pas citer Mouloud Feraoun l’écrivain, sans mentionner son émouvant texte romanesque : « Le Fils du Pauvre », qui nous a tous tenu en haleine, le dévorant tout entier sur les bancs de l’école …Aussi, j’ai eu l’agréable surprise, en revoyant les « bonnes feuilles » d’Afrique Asie, de retrouver publié en exclusivité un extrait du dernier roman de Mouloud Feraoun, « La Cité des Roses » ; qui narre l’amour passionnel entre un directeur d’école algérien et une institutrice française en 1958.

Le pays, encore sous le joug colonial, mais dont on sent l’inévitable libération, sert de toile de fond à cette histoire exemplaire. Le texte est un vibrant hommage rendu à un écrivain doué, assassiné par L’OAS LE 15 MARS 1962, un témoignage remarquable de rigueur et de vérité rendu comme un pied de nez aux esprits malveillants et extrémistes de tous parts …

In petto, l’histoire d’amour tourne court, corroborant la colonisation dont elle reflète les stigmates et le schéma. Françoise, l’héroïne du livre, finira comme la France, par rentrer chez elle. Un retour au bercail prodigieux que nous narre avec un relent d’amertume et de noirceur agrémenté de sublimes délices ; l’auteur tant contesté et admiré : le talentueux Mouloud Feraoun.

Je vais raconter l’histoire véritable de la naissance de ce roman. Achevé fin 1958, ce roman avait pour titre original : L’Anniversaire. Estimant qu’il ne correspondait pas aux attentes du lectorat, l’éditeur demanda à Mouloud Feraoun de faire quelques modifications, lequel refusa de s’y soumettre, en soulignant-dans une lettre écrite- qu’il considérait cette version comme définitive et qu’il avait envie de commencer autre chose.

Il n’écrira l’épilogue qu’un an plus tard, avant de ranger ce manuscrit dans un tiroir de son bureau. En 1962, il entreprend l’écriture d’un autre roman où les personnages centraux sont aussi un Algérien et une Française .L’action se déplace de 1958 à 1962 et les Editions du Seuil feront paraître les premiers chapitres de cet ouvrage à la suite du décès de l’écrivain, sous le titre : L’Anniversaire ,réunissant par ailleurs des études, des souvenirs, des publications ainsi que la suite du Fils du pauvre, qu’elles avaient jugé bon de retirer de la version originale, en 1954, lorsqu’elles en acquirent les droits.

Afin d’éviter toute confusion avec le précédent livre, celui-ci prend désormais le titre de sa première partie : La Cité des Roses. Ce roman posthume sera donc l’histoire exemplaire d’une tragédie, humaine et sociale ; dont on perçoit encore fort longtemps les stigmates, les blessures, les déceptions et les désillusions de tout un peuple emporté par les ravages du temps comme un mal incurable, indicible.

Un soupir nostalgique m’échappe quand je feuillette les pages descriptives de ce village de la montagne Kabyle au début du XXème siècle ; les bonnes feuilles d’un récit autobiographique d’un narrateur durant sa douloureuse enfance, quand s’extrayant à sa condition initiale de berger ; bénéficie de la chance peu commune de conquérir son diplôme et de sortir de la pauvreté.

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