Vilenie que de penser qu’on ne peut pas poursuivre la trame de fil de l’histoire, rebâtir ses sites et monuments relégués dans les eaux glauques d’un oubli incertain et précaire, recoller les morceaux décollés de ses bribes éparses, reprendre le récit et la conservation de ce qui a été cassé er réservé pour l’infini, pour les générations actuelles et futures…
Dans la superbe médina de Tunis, au cœur du Souk El Attarine, quand on presse le pas en descendant vers la mosquée de la Zitouna, on bifurque à un moment à droite sur une venelle de rue qui accède directement à la vieille Bibliothèque fraîchement rénovée. Récemment, elle a ouvert ses portes au public après quinze années d’enfermement et d’obstination…
Je la découvre avec ferveur, par un chaud vendredi de la fin du mois de Mai où quelque part, au Japon-dûment présentée par M.Sato Kentaro, auteur traducteur qui a traduit de l’arabe au japonais « Mokadamet Ibn Khaldoun », en collaboration avec une équipe de douze personnes qu’il a chaudement félicités et nommés..-où les arbres bourgeonnent de toutes les couleurs et les cerisiers en fleurs.je m’y rends donc dans cet endroit magique, restauré et rouvert, à l’occasion de l’attribution du Prix IBN KHALDÜN, à un groupe de lauréats pour l’édition 2016, présents pour recevoir leurs prix s’incarnant en un trophée et un tableau encadré ; tels que Madame Chapoutot-Remadi, Mr.Bozarslan et Mr. Kentaro.
Ces prix sont aussi décernés à titre posthume à Mme Fatma Mernissi, Mr. Abdelwahab Meddeb et Mr. Khaled Foued Allem. Le Prix Ibn Khaldûn pour la promotion des études en recherches humaines et sociales est une heureuse initiative, créée en 2015et présidée sous l’appellation MED21 par le professeur Mohamed Nadir Aziza, écrivain reconnu, et chancelier fondateur de l’Académie Mondiale de poésie de Vérone.
Cette cérémonie chaleureuse eut lieu dans la salle principale de la bibliothèque, quadrillée par les rayons des étagères de livres, alignés des deux côtés comme les pages d’un livre ouvert, ornent les murs les cadres en noir et blancs d’éminents fondateurs et ulémas de la Khaldouniya. Hatem Bourial anime et couvre la manifestation, d’éminentes personnalités de l’université tunisienne, de la culture, de la politique et de la conservation du patrimoine; nationales et internationales sont présentes dans une ambiance allègre, jalonnée de courts intermèdes musicaux et allocutions de bienvenue et d’échanges culturels brefs et sommaires.
Une réception s’ensuivit dans la salle à côté, à l’extérieur récemment découverte, où se trouve bâti dans un net patio la « Midha », sorte de puits à l’allure imposante... Congratulations et félicitations fusaient de toutes parts autour du banquet quasi platonicien. On retrouve de vieilles connaissances, on remeuble les lieux, on réinvestit les secrets du terroir, on se familiarise avec les anciennes éditions d’ouvrages uniques…
La Mémoire est un étrange phénomène qui s’approprie les endroits les plus cadenassés pour mieux les ranger dans des tiroirs à double fermoir, où s’entassent les fibres et les branches du savoir et de la connaissance idéelle…