Les faits saillants des municipales sont :
(1) le faible taux global de participation, accentué chez les jeunes, et
(2) l'effritement des voix telles que le vainqueur n’ait pas dépassé 30% ; mais ce n’est pas la fin du monde.
D’abord, il faudrait noter les entorses suivantes :
-L’exclusion des jeunes par la classe politique qui est parvenue à renverser le cours du processus de démocratisation initialement ascendant (Bottom-up) à un processus descendant (Top-down), est une source principale de leur faible taux de participation.
Ce renversement a été observé depuis la mi-2011, et ne cesse de se confirmer à mesure que :
(1) les jeunes ne sont pas impliquées dans la gestion des affaires publiques,
(2) les politiques publiques ne sont pas performantes,
(3) l’essentiel des coûts de la transition est subi par la population active non-politisée, et que
(4) la perception des jeunes pour les perspectives à venir est plutôt négative. Bref, il s’agit d’un défaut notoire ‘’d’Institutions Inclusives’’.
- Le discours politique n’émane souvent pas des (et ne concerne pas nécessairement les) préoccupations des jeunes et plus généralement de la population :
(1) préoccupations autour du dispositif central de l’Etat et son mode de gouvernance (gestion de son déficit financier, mode électoral, régime politique, remaniement ministériel,..),
(2) intérêt surdimensionné pour des questions inintéressantes en soi et pour-soi (héritage, mariage de la tunisienne avec un non-musulman, le nom de famille aux enfants,…)
- Toujours en conflits d’intérêt, peu inspirée et peu capable de lever les défis de la transition jusqu’alors non-identifiés avec précision, la classe politique s’est avérée, dans sa majorité, très engagée dans la recherche de la rente et/ou fidèle à des formats idéologiques préétablis ; ce qui ne lui sert que dans le court terme.
Le défaut de crédibilité potentiel conséquent limitera alors son action ainsi que ses capacités à fédérer un projet de société.
- Le rôle toujours timide, voire inexistant en temps de transition de l’Elite intellectuelle dans sa mission originelle d’approfondir la compréhension des problèmes collectifs fondamentaux, et dans l'encadrement des jeunes, a été et est en train de se présenter comme un coût d’opportunité élevé.
A cet égard,
(1) expliquer les interactions entre ‘’faible taux de participation’’ et ‘’taille des partis vainqueurs’’ ne serait pas pertinent sans avoir les cohortes et le suivi statistique individuel du comportement des électeurs,
(2) quoique légitime et naturel, le fait de chercher à combler le déficit électoral par de nouvelles formations politiques dites ‘’centristes’’ est en soi une approche de court terme, voire partisane qui s’intéresse aux effets et non aux causes.
Cependant, outre la marche lente mais non incertaine vers la consolidation de la démocratie, des acquis semblent, espérons-le, ‘’irréversibles’’
- Amélioration relative de la conscience des vaincus comparés aux élections de 2011.
-L’effritement global des voix n’est pas surprenant dans une démocratie naissante. En effectuant les calculs, j’ai trouvé que le sort des premières municipales françaises en 1945 au 1er tour (disponibles sur le net) était que 54% des voix étaient distribués sur les 5 sur 6 grands groupements politiques.
Par ailleurs, ‘’ La Section française de l'Internationale ouvrière, SFIO’’, soit un parti crée depuis 1905, a été le vainqueur à 44%...Il aurait fallu attendre un demi-siècle pour que la structure du paysage politique se stabilise.
- Un déclic aux politiciens, professionnels et amateurs sur la nécessité de laisser tomber les arrières pensés idéologiques dont le contexte culturel tunisien n’est pas très adéquat, ainsi que les procès d’intention caducs en temps de transition pour relever le débat…
- Un réel respect annoncé et ressenti, un étonnement de plus en plus confirmé de la part des classes intellectuelles dans plusieurs pays arabes, et une fierté légendaire de ce qui se passe dans notre pays à conserver et capitaliser…