Au moment où nos libertés sont de plus en plus malmenées et que nous avons toutes sortes de raisons de nous en inquiéter, je lis sous la plume de certains de mes amis des argumentaires qui sont aussi sidérants qu’incroyables :
« Ne vous inquiétez pas pour vos libertés…. Pour l’instant il s’agit d’actes de salubrité publique …… il fait le ménage…… nous bâtirons après … »
Dans le cadre de ce raisonnement on peut dès le départ s’interroger sur la nature de ce « ménage ». S’agit-il d’un grand ménage qui ne laisse rien debout ou d’une serpillère à peine mouillée et qui ne va ni dans les coins ni dans les recoins.
En admettant que le grand « nettoyeur » fasse table rase et nous rende un sol lustré que va-on construire et avec quels matériaux ?
Mes amis ne se rendent pas compte que, ce faisant, au nom du grand nettoyage ils donnent un blanc-seing au dictateur.
L’histoire est pleine de « grands nettoyeurs » qui n’ont pas nettoyé grand-chose et qui ont plongé leur pays dans les affres de l’arbitraire et du despotisme. C’est une règle de la sociologie et de l’histoire.
Notre pays n’a pas besoin « d’hommes forts » mais d’institutions fortes pour précisément nous mettre à l’abris de l’homme fort.
La force, en l’occurrence, n’est pas synonyme de conviction et d’engagement.
Mokhlès Marzouki
Du sens de la démocratie….
Si j'ai bien compris…une poignée de mercenaires supposés être des intellectuels, des universitaires ou des tartuffes , des chroniqueurs, des journalistes et des imposteurs….décident du sort de toute une nation et nous contraignent à choisir entre la dictature et la dictature sous prétexte qu'au 21ème siècle et dans un pays comme le nôtre, la démocratie est un luxe qu'on ne peut pas se permettre car à l'origine de clivages et conflits qui conduisent inéluctablement à la faillite de l'État et à sa décomposition…
Oui, il semble que l'Etat en Tunisie, s'il n'est pas policier, ne peut pas gérer d'une manière convenable les affaires du citoyen, puisque celui-ci est inculte, irresponsable, immature, indiscipliné, égoïste, corrompu et corrupteur…Or, toutes ces tares sont liées à la démocratie, au régime politique, à la liberté, aux droits citoyens acquis après la Révolution…selon les analyses perspicaces des chevilles ouvrières de la dictature et des nervis du système….
En réalité, ces tares, nous les devons à un régime tyrannique, mafieux, kleptocrate et illettré qui s'est efforcé durant 23 ans d'avilir le Tunisien et de corrompre ses mœurs…de l'abêtir et de le contraindre à l'ignorance et à la déchéance morale, au point d'en faire un être servile, roublard, opportuniste et couard….
Ce système a tout perverti et nous cueillons aujourd'hui les fruits amers de cette perversion et de l'œuvre d'abrutissement entamée par l'école Ben Ali….
La démocratie est la principale victime de ce système crapuleux.
Fait inédit…
Il est rare qu'un parti politique publie un communiqué pour recommander à ses ouailles de se "la fermer" comme si adhérer à un parti était synonyme d'une perte totale de son libre-arbitre et de son sens critique….
Quand les voix discordantes sont priées d'aller voir ailleurs si j'y suis, c'est que manifestement on a très peu d'estime envers ceux qui ne sont ni dociles ni obéissants et que le risque d'excommunication est bel et bien réel….
J'ai toujours dit que la démocratie ne peut pas s'épanouir dans des contrées propices à la dictature et à la servitude, où l'engagement et l'adhésion sont soumis aux règles de l'allégeance au seigneur et maître et où l'expression de la divergence est considérée comme un acte de rébellion, d'hérésie….
Des partis politiques, de l'extrême gauche jusqu'à l'extrême droite, qui sont dirigés par les mêmes personnes depuis bientôt quarante ans ne peuvent pas être un exemple de démocratie…. Faut-il espérer que dans deux ou trois générations les choses changent ou bien le handicap culturel et intellectuel est tel que s'affranchir de la servitude est une mission impossible…Tout commence dans le milieu familial, y compris le mépris de soi et l'idolâtrie….
Chiheb Boughedir