Il y a une vingtaine d'années, la Tunisie était considérée comme un pays émergent et certains parlaient, probablement avec un excès d’enthousiasme, de miracle tunisien.
Aujourd’hui, après treize années de « liberté », de « dignité » et d’innovations révolutionnaires, la Tunisie vit au jour le jour et très bientôt au goutte à goutte.
A force de transe révolutionnaire et de délire contestataire même de son histoire et de son identité, la Tunisie est devenue un sujet de préoccupation à l'échelle internationale. A force de parler de scénarios envisageables en Tunisie, certaines parties étrangères vont jusqu’à déclarer publiquement craindre le pire et ne sont pas loin de considérer que le peuple tunisien ne peut persister à s’enfoncer dans sa trajectoire autodestructrice et compromettre la stabilité de son voisinage.
Pire qu’un état failli, la Tunisie semble en voie d’être considérée comme une menace à la sécurité et la stabilité régionales.
Quelle que soit la réalité de la Tunisie et de ses équilibres et contraintes socio-économiques, en politique et surtout en politique internationale, la perception est considérée plus forte que la réalité.
Or, la perception du risque Tunisie a l’étranger, notamment à Washington et dans les chancelleries européennes, semble prendre l’allure d’un consensus sur l'incapacité de la direction politique et du peuple tunisiens de parvenir à un scénario crédible de sortie de crise afin d'éviter l’effondrement tant craint par nos partenaires étrangers.
Il n’est pas à exclure que la Tunisie soit de plus en plus perçue comme un pays à la dérive qui risque d’accentuer l'instabilité de son voisinage, en particulier l’Europe et le flanc sud de l’OTAN, causée par des problèmes socio-économiques endogènes et les séquelles internationales du conflit ukrainien qui ressemble de plus en plus au prélude d’une troisième guerre mondiale.
Il y a lieu de craindre que toute menace à la paix et à la sécurité internationales ne puisse être perçue comme dépassant le cadre étroit de la souveraineté nationale et que si la solution ne peut venir de l'intérieur, elle pourrait finir par être imposée de l'extérieur.
L'indépendance et la souveraineté tunisiennes nécessitent un ressaisissement et un plus grand pragmatisme de tous bords sans exception ni faux calculs.