Il est indéniable que l'opération “déluge d’Al Aqsa” a donné lieu à des scènes que personne n’aimerait voir infliger à ses proches ou à un autre être humain quel qu'il soit.
La frénésie destructrice semble même s’emballer avec une étrange complaisance internationale, chacun justifiant les excès de ceux qu’il soutient en dépit du caractère insoutenable des horreurs des deux côtés.
Sans justifier quoi que ce soit, il faut toutefois admettre que cette horreur n’est pas spontanée ou arbitraire et n’est malheureusement qu’un épisode d’une série d'humiliations et d’exactions subies depuis plusieurs décennies par le peuple palestinien et les gazaouis en particulier.
Aux adeptes du droit international, il serait utile de s’interroger sur l'applicabilité au Moyen Orient de la quatrième convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre. Cette convention a été adoptée en août 1949 et est entrée en vigueur en octobre 1950.
Alors que les trois premières conventions règlent le sort des combattants, la quatrième se penche, pour la première fois, sur les protections humanitaires relatives aux civils présents sur une zone de guerre.
Il est utile de rappeler qu’en dépit de l’artifice juridique de l’autorité palestinienne, le peuple palestinien subit le joug d’une occupation militaire étrangère qui vise à anéantir tout un peuple et à gommer son histoire et son identité. Le discours haineux de l'extrême droite qui domine la scène politique israélienne et les épithètes déshumanisants et carrément racistes qui sont affublés par la classe dirigeante israélienne actuelle et les hordes de colons aux citoyens palestiniens n’en sont qu’une des nombreuses illustrations.
Au milieu de ce déferlement de haine, de destruction et d’horreur indicible, il reste encore à espérer que la communauté internationale prendra finalement conscience qu’un tête à tête Palestine-Israël, aussi inégal soit-il, ne pourra pas mettre fin à ce conflit et ne fera qu’accumuler la haine et le désespoir avec des épisodes de plus en plus sanglants et dévastateurs et des risques de plus en plus grands de débordement pour finir par embraser tout le Moyen Orient et peut être même au-delà.
Après la perversion du processus d’Oslo par les gouvernements israéliens successifs à la suite de l’assassinat en 1995 du premier ministre Yitzhak Rabin, avec le soutien actif américain et une complaisance européenne qui prend l’allure d’une repentance humiliante d’un péché historique européen envers les juifs au détriment du peuple palestinien, il urge de mettre en place un nouveau processus de paix moins partial et plus orienté vers une paix juste et durable que l’expansion indéfinie d'Israël au milieu d’un océan de haine quoi qu'en pensent certains gouvernements arabes qui semblent fermer les yeux sur les exactions croissantes de l'extrême droite israélienne et le processus de radicalisation qu'elle alimente dans la région.
S’il y a une relance du processus de paix au Moyen Orient, il faudra qu’elle tienne compte de l'émergence d’un monde multipolaire en associant la Russie et la Chine comme garantes, aux côtés des Etats Unis d'Amérique, pour en assurer la crédibilité, l'impartialité et la durabilité et éviter à toute la région et peut être même au monde entier un apocalypse dévastateur.
En Tunisie, il y aura lieu d’assurer une meilleure harmonisation entre les discours enflammés et les moyens de la Tunisie ainsi que sa capacité d’influence sur la scène internationale et au sein des organisations régionales et multilatérales.
L’impression d’un décalage entre le discours et les actions sur la scène internationale pourrait confirmer l’opinion exprimée par la présidente du conseil italien Giorgia Meloni selon laquelle les discours sont faits en Tunisie pour la consommation locale, laissant entendre une dualité du discours officiel tunisien et peut être même une duplicité politique.
D’autre part, certaines positions suscitent des interrogations chez de nombreux observateurs sur le professionnalisme de l’interaction tunisienne avec des acteurs étrangers.
En tout état de cause, L'importance accordée par le peuple tunisien à la cause palestinienne et la crédibilité historique acquise par la Tunisie au prix du sang des martyrs tunisiens en Palestine et à Hammam Chott exigent une adhésion indéfectible à la légalité internationale et un engagement sans ambiguïté en vue d’une solution juste et durable du conflit palestino-israélien loin des surenchères populistes avec le revers de la médaille fait de realpolitik sur la scène internationale que certains pourraient assimiler à des gesticulations sans effet qui ne peuvent que susciter des interrogations sur la sincérité de l'engagement de la Tunisie et sa crédibilité internationale.
La Tunisie a su sous Bourguiba, jouer un rôle respecté par toutes les parties concernées dans la défense des droits de nos frères palestiniens sans verser dans la surenchère ni la gesticulation spectaculaire.
C’est un fait historique que le leader Yasser Arafat venait en Tunisie régulièrement pour solliciter des conseils et que l’ancien ministre des Affaires étrangères Habib Ben Yahia était considéré comme une référence appréciée par les américains, les russes, les européens, les arabes et surtout les palestiniens pour aider à rapprocher les positions et faire avancer le processus de paix au Moyen Orient.
Si ce processus s’est arrêté pour des considérations stratégiques globales et du fait de l'émergence d’un monde unipolaire, la Tunisie a quand même eu le mérite de soutenir de bonne foi toutes les bonnes volontés désireuses de parvenir à une paix juste, équitable et durable et épargner aux peuples de la région et la communauté internationale des crises et des conflits de nature à menacer la paix et la sécurité internationales.
La Tunisie peut et doit jouer ce rôle en revenant aux fondamentaux de sa diplomatie et en se gardant de faire des relations internationales une arène de passions, de grandiloquence et de faux espoirs.