Alors que l'élection présidentielle en Tunisie est à son stade préliminaire de dépôt des candidatures, il importe aux candidats de se départir des promesses creuses et des slogans clinquants qui ne visent qu'à hypnotiser les électeurs et à récolter des voix sans penser aux défis que posera leur concrétisation compte tenu de la gravité des défis et inerties en Tunisie et de la conjoncture régionale et internationale pour laquelle de nombreux experts prédisent une grave crise économique assortie du spectre d'affrontements militaires avec un risque élevé de dérapage vers un conflit mondial aux conséquences imprévisibles pour toute la planète.
Au-delà des slogans relevant d'idéologies oscillant entre le fantasmagorique et l'obsolète et qui ont montré leur inadéquation avec les réalités et exigences de la Tunisie, les candidats devront faire preuve de candeur et de sens des responsabilités envers un pays extrêmement fragilisé par des décennies de mauvais choix et de gouvernance qui se rapproche dangereusement de l'auto immolation. Une question fondamentale devra être abordée avec suffisamment d'honnêteté, de sérieux et de crédibilité par chaque candidat à la présidence de la Tunisie dans la phase la plus critique de son histoire moderne à savoir le rôle de l'État et sa relation avec la société et l'économie.
S’enferrer dans une vision post coloniale de l’état et de l’administration (post empire ottoman et colonisation/protectorat français) assortie de collecte d'impôts et de relents de plus en plus factices, faute de moyens, d’état providence, ne pourra que perpétuer les inerties, la mauvaise gouvernance et les abus de toute sorte qui, loin d'être épisodiques, prennent l’allure de manifestations systémiques.
La concentration des pouvoirs et la perpétuation du pouvoir discrétionnaire qui tend à se mouvoir en pouvoir arbitraire avec un étalement de l’intervention de l’état et de l’administration dans la majorité des secteurs sociaux et économiques, avec des moyens humains et matériels de plus en plus insuffisants, donne l'impression d’une faiblesse et, même des fois, de la démission de l'etat et de la prolifération des centres de décision et même de contre-pouvoirs en son sein et de ce qui est qualifié par certains d’état profond.
Comme il est admis que trop d’impôt tue l’impôt, il ne serait pas excessif de dire que trop d’état tue l'état, avec toutes les conséquences sociales, économiques et sécuritaires.
La Tunisie est désormais confrontée au défi de revoir le rôle de l’état pour le faire passer du statut de collecteur d'impôts et de contrôleur de l'économie et de la société avec une perception de domination et d’omni puissance, vers une structure d’organisation moderne du vivre ensemble avec le profond sentiment d'être au service du peuple et de son bien être plutôt que de soucier de son omnipuissance et de la perpétuation de son emprise et de ses avantages matériels et immatériels.
Tel est le principal défi de la démocratie, du développement et du vivre ensemble auquel fait face avec une acuité croissante la Tunisie si elle a la volonté de sortir de la spirale infernale de la décroissance et de la dislocation de son tissu social et par-delà de son unité nationale.