La participation du président Kaïs Saied au sommet de la Ligue des Etats Arabes à Djeddah sera-t-elle l’occasion de repositionner la Tunisie sur la scène arabe afin de mobiliser le soutien financier des pays du Golfe et positionner la Tunisie en tant qu’acteur incontournable pour les questions de l’heure?
Il semble qu'à part l'amende honorable à la conférence internationale des (amis de la Syrie tenue le 24 février 2012 à Gammarth et qui a déversé un déluge d’armes et de hordes sanguinaires sur la Syrie dont des milliers de tunisiens, la Tunisie aura très peu à espérer de la réunion au sommet d’une organisation qui ne cesse de perdre son poids et son influence sur les relations internationales et même entre ses membres.
Pour sa part, après la présidence péniblement longue, faute de candidats pour la succession (mars 2019-novembre 2022 ) et en toute apparence stérile, la Tunisie ne semble pas devoir s'attendre à figurer parmi les priorités des pays arabes nantis faute de vision, de message, de communication et de positionnement géostratégique suffisamment clair dans un monde en pleine effervescence et dans un processus accéléré de mutation.
Pour de nombreux pays frères et amis, la Tunisie est devenue une énigme géostratégique et un OVNI idéologique évoquant des relents des discours des années 70 et les bravades des régimes libyen et irakien qui, malgré leur immense richesse pétrolière, ont fini par être ramenés, comme l’avaient promis des responsables américains, à l'âge de pierre avec l'oblitération de l'état national et la prolifération des milices armées et des clans tribaux et ethniques.
La Tunisie qui a atteint un stade avancé d’épuisement des options de salut autonome et refuse en même temps, pour diverses raisons et principalement par crainte des conséquences sociales et sécuritaires, d'adopter les réformes qui lui ouvriront les portes du financement international, manquera d'arguments pour convaincre les pays arabes nantis qui ont leurs propres défis et ont de la peine à comprendre vers où se dirige la Tunisie économiquement et diplomatiquement si ce n’est en se départant du consensus arabe sur de nombreuses questions économiques et internationales.
Alors que les pays arabes nantis, à l'exception d’une Algérie affaiblie diplomatiquement à l'image de sa participation réduite malgré les obligations protocolaires de la passation de la présidence du sommet arabe, semblent considérer avec circonspection le discours militant aux relents dogmatiques prédominant en Tunisie et contrastant avec le pragmatisme économique et diplomatique en vigueur chez l'écrasante majorité des pays arabes ou tout du moins chez les plus influents sur la scène arabe.
Il n’est pas à exclure et même fort probable que la singularité de l’approche et du discours tunisiens n’accentuent davantage la solitude de la Tunisie sur la scène arabe et ne fassent de sa participation au sommet de Djeddah un autre rendez-vous manqué et une opportunité perdue de plus.