La veille
Dix ans après la révolution et d'une pratique quotidienne des libertés que personne n'a jamais osé entravées, y compris les gouvernements les plus rétifs à celles-ci, nous voilà en train de disserter sur un droit sacro-saint, imbibé du sang des martyrs, arraché par le peuple tunisien grâce à ses nombreuses luttes contre les dictatures.
Ce droit, inscrit dans le marbre de la Constitution de 2014, ne peut et ne doit pas être foulé aux pieds par personne, c'est une garantie, l'unique probablement, contre le retour de l'Etat policier et de la tyrannie.
Empêcher les gens de manifester, d'exprimer leur mécontentement, leurs revendications, de protester contre la dérive monarchique de la République, c'est une manière de leur dire : Oui, nous sommes en dictature…
C'est une insulte au peuple d'abord, à la Révolution ensuite et à nos valeureux martyrs enfin.
C'est l'expression d'une volonté de confisquer la parole, l'opinion, l'autorité et de faire taire les voix discordantes.
Demain, 10/10/10 nous ne manquerons pas de vous rappeler que nous ne sommes pas morts, que nous vivons pour et par la liberté...que nous existons grâce à elle et que personne ne pourra nous dépouiller de notre dignité et de notre citoyenneté…
Fermez les gares, les autoroutes, les routes, les chemins de traverse, les ruelles et les impasses, fermez les horizons, fermez les aéroports et les ports, fermez les portes et les fenêtres, vous ne réussirez jamais à fermer la marche de l’histoire…vous êtes déjà le passé, nous, nous sommes l'avenir radieux de ce pays qui a survécu à toutes les trahisons.
Fermez le ban….
Hier, Ce fut un vrai parcours du combattant…
Ce fut un vrai parcours du combattant, une course d'obstacles, un 10000 mètres haies, des labyrinthes, des checkpoints, des barrières, filtrage et contrôle systématiques, tout a été minutieusement préparé pour empêcher les gens de manifester, pour réduire comme une peau de chagrin le périmètre réservé à la manifestation.
Nous étions presque entassés les uns sur les autres au point que les nerfs étaient à vif et que… à tout moment cela risquait de déraper et d'aboutir à un affrontement avec les forces de l'ordre…
La foule des manifestants a été chargée deux fois avec tirs de gaz lacrymogène au menu, s'en suivit une grande bousculade devant le théâtre municipal qui aurait pu être tragique…Nous avons dû parcourir aujourd'hui des kilomètres à pied, contourner tous les obstacles dressés sur nos routes, maintenir notre sang froid malgré les intimidations et les provocations….
Si je raconte cela aux vilains petits canards, c'est pour leur dire que quand c'est la liberté et la démocratie qui sont en jeu…il vaut mieux être du bon côté de la barrière…La vanité serait de se prendre pour un héros, non, nous ne sommes pas des héros, nous sommes tout simplement des citoyens libres et jaloux de leur liberté…Épuisés, esquintés…mais heureux….