Volet (1)"Non, je ne manifeste pas avec eux, ils sont infréquentables"
Il existe une race de politicards, et je dis bien politicards, imbus, très imbus de leur petite personne, narcissiques et vaniteux, nés avec la dernière pluie démocratique, celle qui leur a permis de l'ouvrir bien grande alors qu'elle était cousue pendant soixante ans et qu'elle s'ouvrait uniquement pour dire "bonjour, bonsoir..." et qui osent aujourd'hui narguer les vrais militants, ceux, qui en l'ouvrant bien grande, sont restés pendant de longues années dans les geôles des tyrans, subissant leur violence, leur sadisme, leur arrogance et leurs séances quotidiennes de torture.
Je ne parlerai pas de ceux qui sont morts sous la torture , je ne parlerai pas de ceux qui ont été contraints à de longs exils, je ne parlerai pas de leurs familles, de leurs enfants...martyrisés par un régime cruel et infâme...Je ne parlerai pas de tous les tracas qu'ils ont dû subir en silence, de ces souffrances physiques et morales tues pour conserver cette dignité que le tortionnaire voulait briser....
Je peux être critique envers leurs idées, je peux être diamétralement opposé à leur façon de penser et de raisonner, mais je ne peux que respecter leur combat, les souffrances qu'ils ont endurées, les menus plaisirs dont ils ont été privés, les sacrifices qu'ils ont consentis pour que le Tunisien ne soit plus traité comme un moins que rien....Des milliers de Tunisiens, toutes tendances confondues, ont connu et fréquenté les geôles de la dictature, dès les année soixante, avec les premiers procès politiques, les premières arrestations pour délit d'opinion jusqu'à aujourd'hui, où la machine de la répression a repris du poil de la bête, la bête immonde.
Alors mon zigoto, ces gens-là sont bien meilleurs que toi, sont plus fréquentables que toi et si la rançon de leurs sacrifices est de te permettre aujourd'hui de te prendre pour une lanterne alors que tu n'es qu'une pauvre vessie, c'est que quelque part ils n'imaginaient pas que les resquilleurs comme toi avaient autant de culot.
C'est ton droit, bien sûr, de ne pas les fréquenter, sachant que parmi tous les infréquentables, tu es sans doute le premier de la classe....
Volet(2) Ces morts qui vous maudissent…
Ils sont morts noyés, emportant avec eux, dans les profondeurs noires des abysses du malheur, leurs tourments, leurs espoirs, leurs déceptions, leurs colères, leurs rêves abîmés, leurs soucis quotidiens et pour la plupart leur jeunesse castrée, fracassée, impitoyablement décapitée.
Ils sont morts en maudissant leur pays natal, en maudissant votre indifférence, vos silences, vos lâchetés, votre opulence, votre égoïsme social, votre arrogance d'arrivistes et d'opportunistes, vos soirées mondaines, bourgeoises et bien arrosées, vos voyages, vos tracas de riches futiles et insignifiants, vos magouilles de vilains prédateurs, votre petitesse morale, vos mensonges de vils escrocs.
Ils sont morts en maudissant ce pays qui les a enveloppés du linceul de la pauvreté, de la misère, de la discrimination et de l'arbitraire…
Ils sont morts anonymes parce qu'ils ont vécu anonymes et ce qui est troublant…c'est que pour célébrer leur mort inutile vous faites la queue pour du carburant, pour du sucre, pour du thé, pour du café, pour les immondices qui couvrent votre esprit dévasté par votre égoïsme...alors qu'eux, ils font la queue pour quitter définitivement votre monde carnassier.