Que fait Chalghoum au Trésor ?

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Depuis l’arrivée de Béji Caïd Essebsi au pouvoir à fin 2014, ses lieutenants n’arrêtaient pas de nous affirmer que Ben Ali savait très bien choisir ses technocrates, qui sont à la fois compétents efficaces et intègres.

Profitant de la ratification de sa loi de réconciliation administrative (pour le blanchiment des commis de l’Etat corrompus), il a réussi à réintégrer un certain nombre des coéquipiers de Ben Ali dans divers organes exécutifs.

Mise à part l’intégrité que personne ne saura démontrer, la compétence y était peut-être pour certains collaborateurs de Ben Ali, mais l’efficacité de leurs actions, même si elle était présente, ne dépendait pas de leur génie et savoir-faire.

Il est évident que n’eut été l’autoritarisme du régime policier et de la servitude exigée auprès des organismes économiques et sociaux, les décrets et les décisions de ces ministres auraient du mal à être appliqués sans contestation aucune.

Durant deux ans, nous avons enregistré leur mauvaise approche des dossiers sociaux face à la rigidité de la Centrale syndicale, et nous avons constaté leur mauvaise gestion des dossiers économiques face aux bras longs de la mafia de l’économie de rente et à la puissance de l’économie souterraine.

Le cas de Ridha Chalghoum est époustouflant. Il a agi en criminel vis-à-vis des contribuables et des fournisseurs de l’Etat. Durant 2019, il s’est focalisé sur l’objectif de ramener le déficit budgétaire de 3,5% pour l’année en cours, malgré le dérapage du budget de l’Etat de 6% par rapport à la version approuvée dans le cadre de la Loi de Finances 2019 promulguée en décembre 2018. Pour ce faire, il s’est permis d’user de tous les moyens illégaux et de tous les artifices immoraux.

Tout d'abord, il s'est ingénié à réaliser un record de recettes fiscales au titre de 2019, en refusant de rembourser aux entreprises créditrices en TVA du montant de leurs trop-perçus, dûment vérifiés. Il y a lieu de signaler que le cumul des trop perçus confirmés et non remboursés aux entreprises, est estimé à plus de 500 millions de dinars.

Parallèlement, il s’est permis de suspendre le règlement des subventions au profit des établissements publics, notamment les municipalités et les sociétés de transport régional dont le montant cumulé se chiffre en centaines de millions de dinars.

En outre, le garant des finances publiques s'est évertué à ne pas régler les entrepreneurs ayant parfaitement réalisé des travaux dans le cadre de marchés publics, de nature à endiguer les décaissements au niveau du Titre II, en vue de réduire artificiellement l'endettement public.

À ce titre, le secteur des BTP constitue le principal secteur torturé par le Superman de Ben Ali, en privant les entrepreneurs du produit de leurs livrables conformément aux contrats établis. De ce fait, des dizaines d’entreprises BTP sont financièrement asphyxiées jusqu’à être mises en faillite irréversible.

Du coup, les projets d’infrastructure sont à l’arrêt (chantiers routiers en panne, chantiers hydrauliques gelés, travaux de maintenance suspendus, etc...), ce qui conduit à la multiplication d’inondations dans des zones urbaines et à la prolifération d’embouteillages sur le réseau routier.

Ce faisant, Youssef Chahed et Ridha Chalgoum s’érigent en complices dans la pose des bombes retardement, qui seront subtilement filées au prochain gouvernement, devant constater trois grosses dettes exigibles, vicieusement camouflées:

- trop-perçus de TVA à rembourser,

- subventions publiques à débloquer, et

- travaux livrés et réceptionnés à régler.

En revanche, Chalghoum semble ne pas avoir perdu ses réflexes novembristes scandaleux.

Alors que l’endettement public ne cesse d’augmenter d’une année à l’autre, le Ministère du Trésor continue à abandonner indûment des créances fiscales, en guise de générosité en faveur des champions de l’évasion fiscale et de la fraude déclarative, générosité théoriquement bien récompensée.

Comment peut-on expliquer la non-réaction de Youssef Chahed face à cet acte de corruption manifeste ? Ne s'est-il pas engagé vis-à-vis des tunisiens de faire la guerre contre la corruption et les barons de dépravation ?

Enfin, et concernant l’impératif de restructuration du budget de l’Etat, notre Ministre des Finances n’a épargné aucun effort pour tenter d’honorer plus ou moins ses engagements avec le FMI en matière de plafonnement des salaires de la fonction publique à 12% du PIB.

Pour ce faire, l’astuce utilisée dans l’élaboration du budget de l’Etat 2020, consiste à recourir à la falsification comptable en vue de faciliter le phénomène des vases communicants entre les rubriques du Titre I, particulièrement entre la masse salariale et divers emplois (dépenses imprévues et interventions publiques).

Monsieur le Ministre des Finances, l'équation budgétaire n'est pas du tout complexe. Nous ne vous demandons pas d’étrangler les assujettis, ni de retenir les trop-perçus d’impôts (TVA ou IS), ni de geler l’affectation des subventions aux organismes publics, ni d’empêcher le règlement des fournisseurs de marchés publics, etc...

Nous vous exhortons plutôt à recouvrer les créances de l’Etat auprès des fraudeurs, prédateurs, traficoteurs, usurpateurs, spéculateurs, et d'une façon générale chez les malfaiteurs, et ce, conformément aux dispositions fiscales en vigueur. Autrement, vous serez taxé de malversation, et vous serez pris pour responsable dans la prospérité de l’économie souterraine, le développement de l’évasion fiscale, l’accélération de la fuite de capitaux, et par suite dans la faillite de l’Etat.

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