Que faut-il faire pour barrer la route aux fonds vautours ?
Au-delà des appréciations négatives échangées entre les membres du conseil d’administration du FMI, le représentant des Etats Unis a brillé par son abstention au moment du vote, ce qui constitue un signal lourd de conséquences, en pensant aux garanties ayant été émises par Washington pour couvrir des prêts levés par Tunis sur le marché international.
Il y a là un risque de rupture bilatérale, voire multilatérale, ce qui nous exposerait à la menace des fonds spéculateurs.
Le cœur de notre malaise c’est que la Tunisie est gouvernée, depuis 7 ans, par des politicards dépourvus de patriotisme et obsédés par l'affairisme, quand ils ne sont ni mafia-compatibles ni mercenaires d’intérêts étrangers.
Ils font l’autruche face aux dysfonctionnements primaires (perte de souveraineté et prospérité de la corruption), deux principaux facteurs ayant généré une ramification de problématiques. Par conséquent, aucun plan FMI n’est capable de redresser le gouvernail pour tenter de sortir le pays des eaux profondes et de lui éviter un naufrage de plus en plus certain.
Seul un changement structurant est susceptible d’asseoir des patriotes honnêtes et compétents aux commandes de l'Etat pour engager le plan de sauvetage adéquat.
Quand un médecin prescrit un traitement pharmaceutique incomplet à son malade, il ne peut être considéré comme un ‘‘bon toubib’’ si jamais il est honnête.
Si j'émets des réserves sur l'ordonnance du FMI, c'est par ce qu'elle est également incomplète, ne refermant que des mesures triviales que nous avions prônées depuis 2011 et qui ne concernent que les finances publiques. A ce titre, les directives du FMI passent outre:
1) la problématique de la Corruption, dont les familles politiques au pouvoir contribuent substantiellement à sa prospérité,
2) l'affectation des crédits extérieurs, employés presque totalement dans le financement de la consommation ou le remboursement du service de la dette, et non dans l'investissement productif,
3) l'accentuation du déficit des opérations courantes, née particulièrement de l'accélération du déficit commercial,
- impactant sérieusement la balance des paiements et les réserves en devises,
- poussant mécaniquement le dinar vers une chute sans parachute,
- et acculant l'Etat au surendettement toxique et insoutenable.
Il est clair que le FMI ne se soucie pas des exportations et des importations pour conforter la balance des paiements, mais plutôt de l'apport des privatisations et des concessions à l'adresse des IDE.
Il y a lieu de rappeler que c'est le gouvernement de la troïka qui avait invité le FMI à discuter du financement du ‘‘titre I’’, quand la masse salariale de la fonction publique a été propulsée volontairement dans le cadre des recrutements massifs (environ 90.000 sur 2012-2013). Ensuite, le dérapage du déficit budgétaire a donné naissance et des déficits récurrents et croissants, qui ont nécessité de nouveau le recours à la solution bestiale d'endettement extérieur.
Comme la troïka avait mis le doigt dans l'engrenage du FMI, il était difficile pour le gouvernement technocrate de le retirer, encore plus pour le gouvernement hybride contre-nature. C’est ainsi que le gouvernement Jomâa a accru malencontreusement l’endettement extérieur pour équilibrer des comptes, démarche renouvelée et accentuée par les deux gouvernements NiNa.
Naturellement les fonds levés en devises ont été utilisés pour gonfler artificiellement les réserves de change en vue d'accroître les importations en biens de consommation, notamment les automobiles et les articles de prêt-à-porter. Et ainsi de suite, jusqu'à atteindre les 75% du PIB face à une croissance quasiment nulle, tirée par la consommation de l'importé et les services non marchands (fonction publique).
Maintenant que nous sommes piégés dans le trou du surendettement extérieur, comment faire pour s’en sortir avant que les Fonds Vautours ne tapent à nos portes?
Le bon sens stipule qu’il faut Agir en bon père de famille: "réduire drastiquement les dépenses aux besoins de première nécessité + combattre courageusement toutes les formes de malversation".
Mais quand on a un gouvernement tenu par un consensus antidémocratique entre deux grands partis politiques, financés partiellement par la mafia intérieure et des intérêts extérieurs, la bonne gouvernance devient difficile à réaliser, encore plus le combat contre la corruption.
Ceci étant, nous ne devrions pas désespérer ni fermer nos haut-parleurs. Bien au contraire, nous gagnerions à redoubler d’effort pour mettre la pression sur toutes les Institutions de la République (aussi bien opérationnelles que fonctionnelles), en vue de les acculer à s’acquitter de leurs obligation en matière de combat contre la corruption et de recouvrement de la souveraineté nationale en termes de politique socioéconomique et de maitrise des grands équilibres.
Quant au rebondissement socio-économique, il serait envisageable et réalisable si le patriotisme parvenait à déloger le mercenariat, et l’intégrité parvenait à se substituer à l’opportunisme.