La logique de l'État profond ; Le cas Sihem Boughdiri Nemsia

Certains se posent des questions sur le profil très effacé, presque inexistant, de Sihem Boughdiri Nemsia lors de la visite inopinée du président, du chef du gouvernement et d'autres officiels et journalistes, qui a abouti à son limogeage humiliant. Était-elle fautive, prise au dépourvu face à une malversation ou à une infraction administrative ? Sa déstabilisation était en fait manifeste ; une déstabilisation intrigante mais interprétable, même si les informations ne sont pas disponibles.

Pour une responsable, lorsqu'on accède à son bureau, elle devrait normalement accueillir tout le monde en suivant les pratiques dignes d'un ministre, un membre du gouvernement qui sait recevoir ses "invités", leur serrer la main un à un, en les regardant dans les yeux et en leur adressant un discret sourire de bienvenue. Or, probablement en raison d'un événement majeur, ce protocole a été court-circuité par Kaïs Saied, qui l'a mise dans une position inconfortable en lui ''posant une colle''.

Indépendamment de son implication éventuelle dans des dérives judiciaires ou une gestion déficiente, je pense que des raisons structurelles expliquent en grande partie son immobilisme et sa résignation.

En effet, certains fonctionnaires ne peuvent pas être réellement convaincus d'occuper le poste qu'on leur a confié. Si l'on a passé l'essentiel de sa carrière à exécuter les ordres de ses supérieurs, sans bénéficier de l'empowement ni d'un accès complet aux informations nécessaires, et sans avoir le temps ou la liberté de prendre des initiatives structurelles et profondes, on finit par être inféodé à une hiérarchie et se résigner, au lieu de jouer un rôle transformateur.

Être inféodé à une hiérarchie signifie perdre sa propre substance au profit de son supérieur, comme l’a magistralement illustré Charlie Chaplin. Dans ce contexte, l'ascension à un poste supérieur devient une fin en soi, alors qu'elle devrait être un point de départ pour démontrer ses compétences et convictions personnelles dans la gestion des affaires publiques, qui sont in fine politiques.

Ceux qui sont ainsi inféodés héritent de la logique de l'État profond, qui, selon la littérature, désigne un réseau impersonnel orienté par des intérêts personnels mais aussi collectifs, et qui possède suffisamment de pouvoir et de savoir-faire pour faciliter ou entraver le bon fonctionnement de l'État au regard de ces intérêts.

Je me demande dès alors quel est l'état d'esprit des autres ministres – en particulier ceux issus du milieu universitaire et ayant normalement la personnalité scientifique – membres du gouvernement et occupant des postes de haut niveau. Outre les objectifs gouvernementaux mentionnés dans les lois de finance, quels sont leurs objectifs personnels ? Et comment gèrent-ils les affaires publiques dont ils sont responsables ?

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