Vouloir vendre à tout prix et par n’importe quel moyen se heurte fatalement à la barrière de ces normes. Les industriels qui ont l’ambition de se positionner à l’international n’ont généralement pas d’autre choix que d’accepter le principe qui consiste à composer avec ces normes de façon souple et intelligente.
Le problème est que, à moins de s’en tenir à une gamme très modeste de produits, et à des marchés mineurs, le respect de ces règles requiert une technicité importante. Il suffit pour s’en convaincre de se plonger un moment dans le Codex alimentarius, géré conjointement par la FAO et l’OMS, et qui fixe pour ainsi dire le droit international sanitaire en matière d’échange des denrées agroalimentaires.
Maîtriser cette technicité relève, pour une entreprise, de toute une stratégie qui engage un investissement de départ en termes de compétences et d’équipements. Mais un tel choix comporte plus d’un avantage. Il ne fait pas que lever les barrières sanitaires, dans une conception restreinte de la qualité. Il ouvre aussi la voie à une approche commerciale plus globale où le produit vendu peut devenir comme l’ambassadeur de la région dont il est issu : c’est le produit de terroir… Qu’il s’agisse de fruits, de légumes, de produits transformés qui évoquent nos traditions culinaires régionales, l’action commerciale revêt une dimension culturelle d’échange, qui crée des liens avec la clientèle étrangère et l’installe ainsi dans la durée.
Bien que cette politique commerciale dans le domaine de l’agroalimentaire tende à se répandre dans le monde, rares sont nos industriels qui l’ont vraiment adoptée. D’où, d’ailleurs, l’utilité de saluer ceux qui l’ont fait. La difficulté, en réalité, n’est pas que technique : elle réside dans le fait qu’il faut développer une politique commerciale qui intègre deux mouvements inverses, et que certains considèrent à tort comme opposés ou inconciliables : un mouvement vers l’extérieur où il s’agit de se mettre en conformité avec des normes internationales et un mouvement vers l’intérieur, vers la profondeur de nos régions, où il s’agit d’aller à la rencontre de nos anciennes traditions agricoles et culinaires dans un esprit de partage…
L’habileté commerciale consiste à jongler avec ces deux mouvements, avec la technicité des normes et avec la profondeur culturelle que le produit est susceptible de véhiculer, et que l’on ne découvre ou redécouvre soi-même de façon authentique qu’en la faisant découvrir aux autres.