L'Iran entre deux périls

Après l'assassinat d'Ismaïl Haniyeh à Téhéran, tout le monde s'attend à une réponse de l'Iran... qui effectivement ne peut pas ne pas répondre. Or les autorités iraniennes ont averti qu'elles prendraient leur temps. Qu'elles répondraient au moment qu'elles jugent opportun. Ce qui peut vouloir dire qu'elles attendent elles-mêmes que les Israéliens commencent à baisser leur garde pour frapper.

Mais la réponse est en soi une opération éminemment délicate. Et l'Iran n'ignore pas qu'il est provoqué. Qu'on le pousse donc à réagir d'une manière qui, aux yeux d'une certaine opinion, rendrait légitime une attaque contre lui de plus grande ampleur.

A l'heure où l'allié russe s'empêtre toujours plus dans le bourbier ukrainien, le souci est donc de ne pas offrir aux Israéliens (et à leurs alliés plus ou moins déclarés dans cette affaire) la possibilité de cette guerre, qui serait inopportune…

Dans le même temps, l'Iran n'oublie pas non plus qu'en dehors du fait qu'Ismaïl Haniyeh était probablement la figure politique la plus éminente de la résistance palestinienne et qu'il est mort sur son sol, en qualité d'invité officiel, il y a un élément plus ancien qui l'oblige à ne pas placer la barre de la réponse militaire trop bas. Il y va de sa crédibilité et de la crédibilité de son projet…

On doit se souvenir ici qu'une des causes majeures qui ont joué le rôle de déclencheur de la révolution iranienne, c'est la volonté de prendre en main la cause palestinienne, si mal défendue par les pays arabes d'obédience sunnite. C'est l'ambition de venger, à travers le peuple palestinien, la cause de l'islam et de ses lieux saints face à l'hégémonie de l'Occident.

"Les chiites gagneront là où les sunnites ont perdu !" : tel était le pari secret, que le passage des ans a pu d'ailleurs renforcer. Mais justement, le premier combat à inscrire à son agenda révolutionnaire sur ce terrain, c'était la défense des Palestiniens et de leur lutte de libération. Imaginons un instant la gloire dont l'Iran pourrait se couvrir si la terre de Palestine était rendue aux Palestiniens après que les Israéliens en aient été délogés, sachant l'aide qu'il aura apportée en dépit des obstacles et des risques…

Or aujourd'hui, le réalisme stratégique le pousse à minimiser sa réponse face à un assassinat qui a visé sur son sol l'emblème de cette résistance palestinienne.

Mais la crédibilité de ses ambitions révolutionnaires se trouve menacée de mort en cas de réponse au rabais. Un péril qui n'est peut-être pas moindre que celui d'une guerre.

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