On s'étonne toujours de ce que les gouvernements américains, dans leur diversité, se montrent si indulgents avec Israël, en dépit des crimes commis et de leurs atrocités. Pour s'expliquer la chose, on va imaginer une sorte de mainmise qu'exercerait le lobby juif sur le pouvoir politique aux États-Unis. Et on ne niera pas que ce lobby soit puissant.
Mais cette explication ne fait alors que déplacer le centre du problème. Ce qui maintenant doit susciter l'étonnement, c'est que la démocratie américaine, qui a su dans le passé se montrer capable de cohésion et de force pour faire face à des menaces majeures, comme à l'occasion de la guerre civile contre les États du sud ou lors des deux guerres mondiales, se présente désormais si faible au point de devenir le jouet d'une des communautés qui la compose.
Et ce n'est pas seulement la faiblesse qui mériterait que l'on s'étonne au sujet de cette démocratie, c'est aussi et plus encore le peu de réaction, la résignation, voire le consentement à se trouver réduite au rôle de proie entre les mains d'une communauté particulière et de ses réseaux.
Qu'est-ce qui peut bien rendre compte de ce retournement ? Rien qui soit vraiment valable pour un esprit qui pense sainement. On peut toujours spéculer sur la fragilité de la démocratie américaine, et dans le même temps sur les pouvoirs extraordinaires du lobby juif, on voit bien que tout ça ne donnera qu'une explication forcée, qu'un semblant d'explication.
Voilà pourquoi il paraît plus sage d'aborder les choses sous un autre angle et de considérer qu'Israël ne bénéficie de toutes les indulgences américaines que pour cette raison qu'elle accomplit une mission voulue et conçue par les États-Unis.
Dès qu'on envisage la situation sous cette perspective, tout ou presque s'éclaire. Il suffit de comprendre pourquoi les États-Unis tiennent à être présents au cœur du Moyen-Orient, et pourquoi aussi ils préfèrent l'être par délégation plutôt que directement, et pourquoi enfin la présence juive en ce lieu fait particulièrement leur affaire, pour que tout ce qui suscitait notre étonnement cesse de le faire.