Islam, Révolution et préjugés…

L'idée qu'un mouvement révolutionnaire soit conduit par des gens qui ont fait de l'islam leur référence intellectuelle se heurte à un refus qu'on peut expliquer de la manière suivante, en invoquant trois préjugés :

Premier préjugé : le mouvement révolutionnaire s'inscrit nécessairement dans une tradition de pensée critique opposée à l'autorité du religieux, à l'image de la Révolution française et, plus tard, de la révolution bolchévique en Russie.

Second préjugé : l'islam comme religion ne peut être autre chose qu'une force réactionnaire, tournée vers un passé dont elle veut restaurer l'ordre. En d'autres termes, l'islam peut s'accommoder de la modernité, plus ou moins bien, et plutôt mal que bien, mais au fond il ne peut l'accepter. De sorte qu'il ne peut s'empêcher d'œuvrer à son abolition.

Troisième préjugé, qui prend la forme d'une sorte de position de principe : toute chose ne peut être dans l'avenir que selon le visage qu'elle a donné d'elle-même dans le passé. Il s'ensuit que tout changement de sa part n'est pas le fait d'une évolution naturelle qu'il s'agirait de prendre en considération dans la perception qu'on en a, mais un travestissement mensonger qu'on se doit de relever et de dénoncer.

Penser par préjugés, c'est penser sous le signe de la paresse. Maintenant, cela ne signifie pas que l'idée en question soit facile à comprendre.

Pour que l'islam devienne une force réellement révolutionnaire sur le plan politique, il faut qu'il ait laissé une révolution prendre place en son sein : une révolution intellectuelle et spirituelle. (A moins que la révolution politique soit le moyen qu'elle se donne en vue d'accoucher d'elle-même. C'est un point qui mérite examen).

Parce que l'idée dont nous parlons n'est pas facile à comprendre, il faut admettre que tous ceux qui la défendent ne l'ont pas nécessairement comprise. On peut supposer que beaucoup d'entre eux y voient le signe d'un possible retour du passé glorieux de l'islam.

Cela servira d'alibi aux tenants des trois préjugés. Ils y verront la preuve qui les conforte dans leurs positions. Mais cette preuve n'en est pas une. Elle ne prouve pas que l'idée est fausse, mais seulement que certains en ont une fausse compréhension.

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